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Lias. Des becs calcaires de nautilidés ont été trouvés dans les terrains secondaires, mais non dans les terrains primaires, quoique les coquilles de ces animaux soient en profusion dans plusieurs gisemens. Il semble même que les ammonitidés n’aient pas eu des becs calcaires, puisqu’on n’en a jamais rencontré.

De tout temps les poissons de mer ont dû manger principalement des animaux ; autrement ils n’auraient pu se nourrir ; toutefois il est à noter que les squales, qui sont les plus grands carnivores, ont apparu tardivement. Si le Carcharodon mégalodon, dont les dents atteignaient 0m,13 de haut, avait les mêmes proportions que les requins, dont les dents ont 0m,05, il devait avoir 13 mètres de long ; ce gigantesque destructeur n’a vécu qu’à partir du Tertiaire moyen.

Les reptiles ont été pour la plupart des carnivores, mais leurs carnages n’ont pas été tels qu’on pourrait le supposer d’après leur nombre et leur grandeur. D’abord, je ferai remarquer que les plus redoutables d’entre eux ne sont arrivés que durant les temps secondaires, alors que le monde organisé était déjà très avancé dans son développement. En second lieu, nous constatons que ceux dont la taille a été la plus extraordinaire ont été des herbivores sans doute inoffensifs. Plusieurs même des carnivores ont dû être peu destructeurs, dévorant des cadavres aussi bien que des bêtes vivantes. Delegorgue prétend que les crocodiles conservent plus de créatures qu’ils n’en détruisent ; il a écrit : « S’il n’existait pas de crocodiles, les débris putréfiés s’accumulant à l’embouchure des rivières... il en résulterait pour les hommes des maladies pestilentielles qui enlèveraient infiniment plus de personnes que tous les crocodiles de la terre. »

On sait d’ailleurs que les animaux à sang froid mangent beaucoup moins que ceux à sang chaud. M. Vaillant a publié d’intéressantes informations sur la ménagerie des reptiles du Muséum dont il a la direction. Il raconte qu’un boa du Brésil, l’Anacondo, long de 6 mètres, bien portant, n’a fait en six ans et demi que trente-quatre repas, soit cinq en moyenne par an. Il m’apprend aussi que les 36 crocodiles du Muséum consomment en moyenne par jour 11 kilogrammes de viande, ce qui fait, pour chaque jour et chaque animal, la somme de 300 grammes ; c’est peu, comparativement à ce que mangent les mammifères. M. Sauvinet me dit que, dans la ménagerie des bêtes féroces du Muséum, il compte chaque jour 3 kilogrammes de viande pour une hyène, autant pour une panthère, et 5 kilogrammes pour un lion.

J’ai été frappé de voir que tous les grands reptiles du Permien d’Autun ont eu, comme les Ichthyosaurus du Lias, des coprolithes