fut vif le ressentiment que ce verdict causa en Allemagne et quelles en furent les conséquences déplorables.
Le 29 novembre. la Correspondance provinciale, organe semi-officiel, consacrait un long article à la reproduction des faits qui venaient de se passer, et y ajoutait une phrase très blessante pour la France que je ne crois pas devoir reproduire, même aujourd’hui. Le 6 décembre, un nouvel article plus court, mais rédigé dans une forme presque aussi dure que le précédent, parut dans le même recueil. Il disait, en résumé, que le gouvernement français ne paraissant pas en mesure de contenir les passions de vengeance des populations, le gouvernement allemand s’était vu contraint de consacrer ses forces militaires à la protection de la vie et de la sécurité de ses nationaux sur tous les points des départemens restés soumis à son action. L’état de siège avait été proclamé sur toute l’étendue du territoire occupé par les troupes allemandes, et, en conséquence, les crimes commis contre des soldats allemands seraient jugés désormais par les tribunaux militaires allemands.
Le lendemain, 30 novembre, M. Delbrück vint au nom du chancelier demander au Reichstag le vote jusqu’en 1874 des crédits militaires que l’opposition voulait limiter à deux années. Il motiva sa demande par des considérations politiques tirées surtout de la situation intérieure de la France. M. Delbrück eut soin de déclarer que si, dans son opinion, un fort parti poussait chez nous aux idées d’une revanche immédiate, il reconnaissait que le gouvernement était complètement étranger à ces tendances. Mais il fallait prévoir l’avenir ! A la suite de ces déclarations, le crédit fut voté, et il ne l’eût peut-être pas été sans cet incident.
En même temps que ce vote avait lieu au Reichstag et que ces articles paraissaient dans la Correspondance provinciale, le prince de Bismarck envoyait une dépêche au comte Arnim, datée du 29 novembre, dans laquelle il développait avec une grande vivacité le même point de vue que celui de la feuille officieuse. Cette dépêche, écrite en allemand et destinée au comte Arnim, fut communiquée à M. de Rémusat. Jusqu’ici le procédé n’avait rien d’insolite, mais ce qui le fut davantage, c’est qu’à quelques jours d’intervalle, ce document fut traduit et inséré dans tous les journaux. L’impression en fut péniblement ressentie en France, et le gouvernement eut raison d’en être d’autant plus affecté que la dépêche mettait le plus grand soin à traiter le cabinet français avec une bienveillance marquée et à le séparer de la nation, pour accabler celle-ci d’accusations très pénibles.
Nous ne pouvons accepter cette distinction, m’écrivit