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l’entourage de Louis XIII, on projetait de le séparer d’elle, et qu’on voulait emmener le roi à Lyon pour l’arracher à l’autorité de sa mère. La reine, avertie par le nonce, eut une conversation avec le roi, à la suite de laquelle elle se déclara entièrement rassurée.

Cependant, les ministres persévéraient dans la politique énergique qu’ils avaient inaugurée. Leur seule chance reposait maintenant sur le succès des armées royales. Aussi, Luçon se multipliait pour assurer le recrutement et la solde des hommes, pour stimuler les officiers, leur donner quelque chose de l’ardeur désespérée qui l’enflammait lui-même. Schomberg, à peine arrivé en Allemagne, y avait conclu avec le rhingrave des capitulations et avait levé 400 reîtres et 400 lansquenets ; on faisait en Suisse des levées importantes. Plusieurs milliers d’hommes se dirigeaient vers la France et venaient renforcer les armées royales. Enfin, celles-ci se mettaient en mouvement et obtenaient de premiers succès. Les forces qu’elles avaient devant elles n’étaient ni organisées ni commandées. Les princes ne pouvaient compter que sur les quelques milliers d’hommes que Bouillon était allé recruter dans le pays de Liège et qu’il amenait lentement à leur secours.

Dans le Nivernais, Montigny, qui avait pour aide de camp le marquis de Richelieu, s’empara de toutes les places appartenant au duc et enferma, dans la capitale de la province, la duchesse de Nevers qui lui avait tenu tête très vaillamment. Le comte d’Auvergne avait pacifié tout le Maine et le Perche ; il était libre maintenant de marcher au secours du duc de Guise. Celui-ci avait eu également, dans les provinces de l’est, des succès assez importants. Il avait pris Richecourt, Château-Porcien, Cezigny et mis le siège devant Rethel. Nevers, poussé de place en place, ne gardait plus que Mézières, tandis que le duc du Maine, bousculé par le comte d’Auvergne, qui s’emparait successivement des châteaux de l’Ile-de-France, était contraint de s’enfermer dans Soissons. Ainsi trois sièges importans, commencés presque simultanément à Nevers, Soissons et Rethel, devaient mettre fin bientôt à la révolte des princes.

Les ministres commençaient à respirer. Ceux mêmes qui ne leur sont pas favorables reconnaissent que « par leurs bons soins et diligences, les princes et grands avoient été si vivement attaqués et serrés de si près qu’ils étoient au désespoir et ne savoient où avoir recours. » Luçon pouvait croire que l’on touchait au but.