Allemands avec les Boërs. Puis, ils ont tourné ces derniers par le Nord pour empêcher leurs communications possibles avec la colonie allemande de l’Afrique orientale. Ils les ont enfin complètement cernés, avec la ferme intention de se mettre un jour à leur place. Quant au Portugal, on sait comment ils l’ont traité. Malgré tout, l’Allemagne n’a pas renoncé à ses vues premières ; elle les a seulement modifiées et en poursuit la réalisation par d’autres procédés. L’intérêt si vif qu’elle témoigne aux Boërs en est la suite naturelle et logique. C’est son intérêt de soutenir les petites nationalités indépendantes ou les petites colonies européennes contre la prédominance de plus en plus écrasante de l’Angleterre, et elle le poursuit avec obstination. Elle entend maintenir ce qui reste encore d’équilibre entre les forces en présence, et cet équilibre ne peut être maintenu que par son intervention effective et résolue. Une partie en plusieurs actes, très sérieuse, très complexe, est donc engagée entre l’Angleterre et l’Allemagne dans ces régions de l’Afrique, et ce qui vient de se passer n’en est qu’un épisode. Nous n’en tirons qu’une conclusion, c’est que l’heure a sonné où les questions africaines, aussi bien que les questions asiatiques, ont leur contre-coup immédiat en Europe et y modifient les anciennes relations des puissances. Il suffit, — qui l’aurait cru il y a vingt ans ? — que le docteur Jameson passe la frontière du Transvaal pour qu’une polémique furieuse se déchaîne entre l’Angleterre et l’Allemagne, et qu’on parle même de danger de guerre. La guerre n’éclatera pas ; nous n’y croyons pas ; les temps ne sont pas encore mûrs ; mais, dès aujourd’hui, l’Angleterre peut se rendre compte du péril que lui fait courir son isolement. On a dit autrefois et on peut répéter toujours que la question d’Orient est essentiellement une question d’Occident, pour faire entendre qu’elle est dominée et dirigée par les préoccupations d’intérêt des puissances occidentales. Eh bien ! le jour approche où les questions africaines seront des questions purement européennes, et il en sera de même des questions asiatiques, et aussi de quelques autres encore. Alors, l’Angleterre devra se demander s’il n’est pas sans inconvénient pour elle de ne tenir systématiquement aucun compte des intérêts, parfois même des droits d’aucune autre puissance, et de ne se ménager en Europe ni sympathies, ni alliances. Elle a pu jusqu’ici se passer de tout le monde, mais c’est à la condition de ne pas mettre tout le monde contre elle, et de ne pas s’exposer à une brusque surprise dont celle d’hier n’est qu’une première et légère esquisse. Elle est trop prudente et trop sage pour ne pas tenir compte de cet enseignement.
Quant à la France, elle n’a aucune part à prendre dans ce conflit. Nos sympathies, comme celles de toute l’Europe, sont acquises à ce petit peuple boër qui a si vaillamment et si heureusement défendu sa liberté. Il a donné dans l’histoire un bon et salutaire exemple, et ce n’est