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a entraîné une dépense d’une trentaine de millions. Ce chiffre, répondant à 5 500 francs environ par kilomètre, est bien élevé, pour des lignes exploitées en général avec 3 ou 4 trains seulement par jour dans chaque sens, la plupart très peu chargés. Il est vrai qu’il comprend une part des frais généraux et des dépenses des gares communes calculée proportionnellement au nombre des trains, et non à leur chargement ; même en tenant compte de ce fait, quand on le compare aux dépenses des compagnies secondaires, il paraît tout à fait excessif. Cette situation tient à ce fait bien connu, qu’il est infiniment difficile de faire accepter du public l’emploi, par les grandes compagnies, même sur des lignes tout à fait secondaires, des procédés économiques qui permettent aux petites compagnies d’exploiter à très bas prix. Quand, par exemple, une grande compagnie organise le service des très petites gares ou haltes avec un seul agent, ou même avec une femme seule, en insérant dans les règlemens l’obligation, pour les expéditeurs et destinataires, de prêter leur concours à la manutention des colis, elle soulève souvent de très vives récriminations. Il est pourtant impossible d’exploiter au même prix que les petites compagnies, en offrant au public toutes les commodités qu’il a l’habitude de trouver sur les grandes artères. La réduction des dépenses des lignes secondaires est un des points sur lesquels il y a beaucoup à faire. C’est un de ceux sur lesquels il est du devoir de l’administration de stimuler les compagnies, et à plus forte raison, de les soutenir, quand elles prennent l’initiative des mesures d’économie.

L’augmentation des quantités transportées sur les lignes anciennes a été, comme nous l’avons expliqué, très supérieure à celle des recettes, par suite de la diminution des tarifs. Or ce n’est pas l’augmentation des recettes, c’est celle des transports, qui règle la progression des dépenses. Sans doute, sur les lignes à trafic médiocre, on peut y faire face simplement par une meilleure utilisation du matériel et du personnel. Mais dans les grandes gares, le personnel est à peu près proportionnel au trafic ; de même, sur les grandes lignes, où les trains atteignent souvent leur limite de charge, il faut en augmenter le nombre quand le trafic augmente. Abstraction faite des besoins propres des lignes neuves, le nombre de kilomètres parcourus par les trains a augmenté d’environ 30 millions, ou de 18 pour 100, de 1884 à 1894.

Cette augmentation, entraînant au moins 30 millions de francs[1] de dépenses supplémentaires paraît dépasser les strictes

  1. La division des dépenses totales d’exploitation par le parcours des trains donne un prix moyen de 2 fr. 50 par kilomètre ; mais ce chiffre comprend des frais généraux et des dépenses permanentes qui ne varient pas proportionnellement au nombre des trains.