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montant effectif des dépenses et des recettes. Le taux de l’intérêt garanti était le seul élément du calcul toujours fixé à forfait, quel que fût le taux réel des emprunts que contracteraient les compagnies.

Les clauses que nous résumons ainsi n’apparaissent pas au premier coup d’œil dans les conventions de 1859 ; elles y sont enveloppées dans des complications d’une extrême ingéniosité. La garantie ne s’applique, nominalement, qu’au nouveau réseau, constitué par les lignes les plus récemment concédées ; elle est accordée pour cinquante ans à dater de 1865, au taux de 4 pour 100 plus l’amortissement, ce qui donne 4,655 pour 100 seulement. Les artères principales constituent l’ancien réseau, qui n’a aucune garantie. Sur les produits de cet ancien réseau, chaque compagnie retient, à titre de revenu réservé, la somme nécessaire pour payer le dividende de ses actionnaires, et pour porter à 5,75 pour 100[1] la somme dont elle pourra disposer pour assurer l’intérêt et l’amortissement des capitaux dépensés en dehors du capital-actions. Le surplus du produit net de l’ancien réseau est déversé sur le nouveau, pour venir en déduction des déficits à combler par la garantie de l’Etat. Mais comme il n’était pas douteux (et sur ce point l’expérience a confirmé les prévisions) que l’ancien réseau fournirait largement, et au-delà, le revenu réservé, toutes ces combinaisons revenaient, au fond, à la garantie d’un dividende conventionnel pour le capital-actions, et d’un revenu de 5,75 pour 100 pour le capital-obligations.

Du jour où les conventions de 1859 ont été ratifiées, le crédit des compagnies est devenu une branche du crédit de l’État, qui s’est trouvé engagé moralement autant que légalement envers les porteurs de titres. Dès lors, l’association créée entre les contribuables et les concessionnaires commandait toutes les mesures à prendre dans le présent et dans l’avenir. En particulier, l’extension du réseau n’était plus possible que de concert avec les compagnies. Il était bien clair, en effet, qu’autoriser la création de lignes concurrentes, pour les grands courans de trafic, eût été folie, de la part de l’Etat, dont la garantie s’atténuait de toutes les sommes déversées sur le nouveau réseau par les artères principales. Ainsi, toutes les lignes à décréter dans l’avenir devraient être nécessairement conçues comme des affluens des lignes déjà construites ; elles ne pourraient, par suite, être avantageusement concédées qu’aux détenteurs de ces lignes préexistantes, appelés à

  1. Par exception, pour le Nord, ce taux était réduit à 5,50.