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charges : c’est la construction de lignes neuves dont le trafic ne peut rémunérer le capital d’établissement. L’autre constitue un élément de variations considérables, tantôt dans un sens tantôt dans l’autre : c’est le lien établi entre les finances publiques et les résultats, en gain ou en perte, de la branche principale de la grande industrie des transports. Comme la marche des travaux est réglée par le législateur, et comme l’exploitation est soumise, dans tous ses détails, au contrôle administratif, les pouvoirs publics exercent sur ces deux élémens une action incontestable. Mais, pour bien apprécier la portée de cette action, et les effets qu’on en peut attendre, il faut avoir sans cesse présentes à l’esprit les formes variées sous lesquelles le régime des voies ferrées se répercute dans le budget. C’est pour cela qu’après les auteurs de tant d’études remarquables, nous ne croyons pas inutile de revenir encore une fois sur cette question, en la serrant d’aussi près que le permettent les documens les plus récens.

Toutefois, avant d’entrer dans le détail de la situation actuelle, nous croyons devoir rappeler brièvement les origines du régime de nos chemins de fer. Envisagé directement en lui-même, abstraction faite des circonstances auxquelles a été subordonné son développement, ce régime, apparaîtrait comme un chef-d’œuvre d’absurdité. La connaissance des faits successifs d’où sont sorties, peu à peu, les conditions actuelles de la garantie d’intérêts, ainsi que le mode et le montant de la participation respective de l’Etat et des compagnies dans le développement du réseau, est indispensable pour permettre de comprendre la situation qui est faite aujourd’hui au Trésor public, et les engagemens qui pèsent sur lui. Nous sortirions de notre sujet, en entrant à cet égard dans trop de détails ; mais nous sommes obligé d’esquisser, à grands traits, l’historique de nos chemins de fer, pour pouvoir ensuite parler couramment des charges et des recettes budgétaires qui s’y rattachent aujourd’hui.


I. — LES CONVENTIONS DE 1859 ET LEURS DÉVELOPPEMENTS

L’histoire des chemins de fer, en France, est marquée par trois grandes étapes : la loi du 11 juin 1842, — les conventions de 1859, — celles de 1883.

La loi du 11 juin 1842 n’a laissé, dans notre réseau actuel, d’autre vestige que l’excellente constitution de son ossature, due à l’heureux tracé adopté, à cette époque, pour les lignes magistrales répondant aux grands courans de trafic. Cette loi organisait, pour la construction des chemins de fer, un système dans lequel les