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Parmi ces charges, il n’en est aucune que l’opinion publique supporte avec plus d’impatience que celles qui se rattachent aux chemins de fer ; il n’en est aucune, cependant, dont l’accroissement soit plus directement provoqué par cette même opinion publique. L’extension du réseau, l’amélioration des services, l’abaissement des tarifs, ne progressent jamais assez vite pour répondre aux vœux des populations et aux demandes de leurs représentans ; puis on s’étonne que les charges budgétaires croissent, sous l’action continue et concordante de ces diverses causes.

Le cri d’alarme a été poussé avec une énergie particulière, au commencement de l’année dernière, par M. Burdeau, dans l’exposé des motifs du budget de 1895. Il évaluait les charges que ce budget aurait à supporter du chef des chemins de fer à 265 millions, en ne comptant que les crédits spéciaux, à 411 millions, en y ajoutant ceux qui se confondent dans le service général de la dette publique. Il faisait observer que ces charges allaient en croissant d’année en année, qu’elles pourraient augmenter encore d’une centaine de millions, et qu’il n’était point de finances qui pussent supporter longtemps une pareille augmentation pour un seul service.

Ce cri a été entendu. En même temps que la loi des finances de 1895 réduisait, dans une large mesure, les autorisations de dépenses, de manière à enrayer la marche ascendante des annuités incombant au budget, les ministres des Travaux publics, M. Jonnart et M. Darthou, orientaient résolument, à travers toutes les difficultés, l’action de leur administration vers les économies et vers la réduction de la garantie d’intérêts. Ils ont fait, dans ce sens, des efforts d’autant plus méritoires, en cette matière, que ceux qui en assument l’impopularité en recueillent rarement les fruits ; car d’après le mécanisme de nos conventions, c’est seulement dans les budgets ultérieurs qu’apparaissent les résultats des mesures d’économie prises au cours d’un exercice. Ces efforts énergiques n’ont point été stériles, et le budget de 1896 v° déjà en profiter largement.

Le but de l’étude que nous entreprenons est de bien préciser le montant des charges annuelles que les chemins de fer font peser sur le Trésor public, et de placer en regard les recettes qu’ils lui procurent ; de rechercher les motifs des variations survenues dans ces charges et ces recettes, depuis que les conventions de 1883 ont fixé le régime actuel de nos chemins de fer, et notamment la part du déficit total qui doit être attribuée à ces conventions, plus ardemment discutées, peut-être, depuis qu’elles sont sanctionnées par la loi, qu’elles ne l’ont été avant le vote des