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possible, par une loi aussi fatale que les lois mathématiques elles-mêmes, faire de bonne politique.


II. — LA REPRÉSENTATION PROPORTIONNELLE DANS SON FONCTIONNEMENT

La représentation proportionnelle repose, au fond, sur ce principe : pour faire de bonne politique, faire d’abord de bonne arithmétique ; avec son corollaire naturel : meilleure sera l’arithmétique, meilleure aussi la politique. La politique est mauvaise aujourd’hui, parce que l’arithmétique du suffrage est mauvaise ; parce que de très grosses minorités et parfois la majorité même du pays ne sont point représentées au parlement ou ne le sont que d’une manière tout à fait défectueuse. La politique sera bonne quand l’arithmétique sera bonne, quand tout groupe d’électeurs de quelque importance numérique sera représenté, et le sera en raison directe de cette importance. Déterminer arithmétiquement le rapport de la force numérique à la puissance politique, restaurer la proportion entre représentans et représentés : voilà la fin et de là le nom de la représentation proportionnelle.

On dit que tout groupe d’électeurs « de quelque importance numérique » a le droit d’être représenté, et de l’être en raison de cette importance. La première chose à faire est, par suite, de définir ce que l’on entend par ces mots : tout groupe de quelque importance, et l’importance des groupes, on ne peut pas la fixer arbitrairement ou empiriquement, puisque la représentation proportionnelle se propose, entre autres corrections et améliorations, d’éliminer de l’élection l’empirisme et l’arbitraire. Et comme c’est la première chose à faire, comme il faut la faire mathématiquement, elle met tout de suite dans le cas de procéder à une première opération, laquelle donnera la mesure, le mètre électoral, l’unité de représentation. Mais si c’est sûrement la première opération à faire que de trouver le mètre électoral et si les premiers partisans de la représentation proportionnelle l’ont bien compris dès le début, il y a plusieurs moyens d’y procéder, et — de ce qu’il y a divers moyens — un premier motif pour qu’il y ait divers systèmes de représentation proportionnelle.


Vote limité et vote cumulatif.

Nous ne voulons plus parler que pour mémoire du vote limite et du vote cumulatif, qui ne se rattachent à la représentation proportionnelle qu’en filiation illégitime. Le vote limité consiste, on se le rappelle, en ce que, dans une circonscription où il y a, par exemple, quatre députés à élire, chaque électeur ne puisse