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LE CONSEILLER GENEVOIS FRANÇOIS TRONCHIN
ET SES
RELATIONS AVEC VOLTAIRE

« L’ermite de Ferney, écrivait Voltaire le 23 décembre 1763, présente ses hommages à M. François Tronchin… Nous sommes tous ici assez gais, aimant beaucoup M. François, M. Jean Robert, M. Jacob, M. Tronchin le procureur général, M. Tronchin l’Esculape général et toute la tribu. » L’ermite de Ferney avait sujet d’aimer toute la tribu des Tronchin ; il avait eu souvent besoin d’eux, les avait fait travailler pour lui. Il avait de grandes obligations au docteur Théodore Tronchin, savant médecin doublé d’un habile homme, qui méprisait les faiblesses humaines et dans l’occasion savait les exploiter. Voltaire faisait si grand cas de cet « Esculape général », que le désir de se rapprocher de lui et d’être à même des consultations fut une des raisons qui le déterminèrent à venir se fixer en 1754 dans les environs de Genève. Il devait beaucoup aussi à un cousin du docteur, Robert Tronchin, sagace et heureux financier, « d’esprit cultivé, de mœurs faciles, recherché et fort bien en cour. » Enrichi par le système de Law, et tour à tour banquier à Paris et à Lyon, il avait en 1762 succédé à M. d’Epinay dans la charge de fermier général. « Cet événement inopiné, écrivait à ce propos l’illustre docteur, a beaucoup étonné notre patrie. Il est sans exemple qu’un protestant et un étranger ait reçu pareille marque de distinction, bien moins encore, qu’il ait obtenu une place aussi lucrative. » Voltaire avait confié à Robert Tronchin la gestion de sa fortune, à Théodore celle de sa santé. Un troisième Tronchin, beaucoup plus obscur, devait lui rendre une foule de petits services en devenant son factotum, chargé, selon les cas, de conclure ses marchés, de l’assister