Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 131.djvu/709

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

tertia, Æterne rerum Conditor, Veni Redemptor geatium, Illuxit orbi jam dies, Bis ternas horas explicans, telles sont les hymnes attribuées à saint Ambroise par d’irrécusables témoignages. Quant aux quatre autres : O lux beata Tnnitas, Hic est dies verus Dei, Splendor paternæ glorix, Æterna Christi munera, leur authenticité, quoique moins prouvée, ne nous paraît pas non plus sérieusement contestable.

Le vers employé par saint Ambroise, et devenu typique en Occident pour l’hymnodie liturgique, est le dimètre ïambique.

Il se rencontre déjà en série continue chez le plus ancien lyrique latin, Lœvius; chez Horace, il apparaît seulement comme second vers d’un couplet épodique. Le rythme du motif principal de l’Hymne à la Muse n’en est qu’une légère variante. C’était apparemment, au IVe siècle, un modèle rythmique très familier à l’oreille : son extrême facilité le rendait propre à être chanté par les masses.

Après nous avoir fait observer, à ce propos, que toutes les cantilènes hymnétiques présentant quelque ancienneté appartiennent à l’un des trois modes principaux de la musique grecque classique, le Dorien, l’Iastien, l’Eolien, et après avoir examiné les soixante pièces de ce genre parvenues jusqu’à nous, M. Gevaert en arrive à conclure qu’une vingtaine seulement de ces pièces présentent au musicien un très sérieux intérêt, les autres n’étant guère qu’imitées des premières, et qu’en somme l’hymnographie latine a atteint dès son origine son point de culture le plus élevé, la seconde génération ayant versé déjà dans l’art très relatif de la contrefaçon.

« Enfin nous arrivons à l’objet spécial de notre examen, dit-il : les antiennes de l’office des Heures. Les cantilènes dont nous nous occuperons désormais ont généralement pour texte les paroles mêmes de l’Écriture sainte : elles ne connaissent d’autre rythme que le parallélisme de la poésie des Hébreux, et n’ont retenu de la musique de l’antiquité profane que l’élément imposé par le milieu historique et social ; les modes sous leur forme concrète, c’est-à-dire les motifs mélodiques généralement répandus dans le monde romain. Le domaine exclusif du chant antiphonique est le service divin. »

Et ce chant antiphonique, répétons-le ici, c’est le vrai plain-chant. On appelle antiphone ou antienne la cantilène entonnée par le préchantre avant le psaume ou le cantique biblique. Musicalement elle forme l’introduction et le finale du chant psalmique, auquel elle se relie par la communauté de mode. Nous avons vu que chez les anciens tout morceau de chant était précédé d’un prélude instrumental dont le but était d’inculquer à l’auditoire, et à l’exécutant lui-même, le ton et le mode de la mélodie vocale. Lorsque l’Église adopta la psalmodie collective, une formule musicale de même genre devint indispensable pour indiquer au chœur des fidèles l’air et le diapason du psaume à chanter. Or,