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terre, les tiges ont noirci, les feuilles ont disparu, leur rôle est terminé : elles se sont épuisées à nourrir les tubercules que la houe ramone à la surface du champ.

Dans la formation de la graine ou dans celle du tubercule, le dessein de la nature est le même : la production des organes destinés à conserver l’espèce, à la perpétuer, à la disséminer. Dans la graine ou le tubercule se trouvent accumulés sous un petit volume tous les produits que la plante a élaborés pendant sa vie pour nourrir l’embryon de la graine ou le bourgeon du tubercule et lui fournir an retour de la bonne saison les matériaux nécessaires à la formation des nouveaux organes. Or, ces substances nécessaires aux germes végétaux sont aussi îles alimens pour les hommes et les animaux : de là les immenses surfaces que consacrent tous les peuples, depuis un temps immémorial, à la culture des plantes à graines comestibles : blé, seigle, orge, avoine, pois, haricots, sarrasin, etc., ou aux plantes qui forment des tubercules : pommes de terre et topinambours dans nos contrées ; ignames, patates, dans d’autres pays.


III

La pomme de terre, nous l’avons dit déjà, se prête à de nombreux usages ; elle entre pour une large part dans la consommation humaine, l’on en tire de la fécule, on métamorphose cette fécule en alcool, enfin on utilise les tubercules à la nourriture des animaux domestiques. Les pommes de terre destinées à la table acquièrent des valeurs très différentes suivant qu’elles sont de conserve ou qu’elles viennent d’être récoltées ; les pommes de terre nouvelles font prime sur le marché : elles sont obtenues par la culture maraîchère, qui emploie des procédés un peu différens de ceux qu’utilise la grande culture, dont il faut nous occuper d’abord.

Pendant longtemps la eu Hure de la pomme de terre industrielle est restée stationnaire dans notre pays : la statistique de 1882 nous montre que les rendemens à l’hectare sont en général médiocres, ils ne dépassent guère 10 000 kilos ; or les tubercules destinés à l’industrie ou consommés à la ferme ne valent que 4 à 5 francs le quintal : on réalisait donc de 400 à 500 francs de produit brut à l’hectare, ce qui n’est que peu avantageux.

Sans doute, tout le monde n’en était pas là : M. Dailly, de Trappes, qui a laissé une comptabilité très bien tenue, accusait pendant les années 1845, 1863, 1875 des rendemens de 30 000 kilos, mais ils étaient exceptionnels, et en moyenne la récolte