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premiers jours de juillet, s’accroissent en même temps que les feuilles et les tiges pendant l’été ; mais tandis qu’en septembre les feuilles se flétrissent et tombent, que les tiges sèchent et méritent de plus en plus le nom de fanes sous lequel on les désigne, les tubercules continuent à s’accroître jusqu’au milieu d’octobre, époque à laquelle on procède à leur récolte.

Le développement des liges et des feuilles précède celui des tubercules, et il est nécessaire qu’il en soit ainsi : la feuille est le laboratoire de la plante, la petite usine dans laquelle s’élabore la matière végétale ; le tubercule n’est que le magasin dans lequel s’accumule cette matière qui lui est amenée par les vaisseaux de la lige.

Nous avons indiqué déjà dans un article précédent[1] quelle est l’origine des matières végétales, et il est inutile d’y revenir. Les feuilles travaillent dans la pomme de terre comme dans les autres espèces cultivées ; mais, tandis que, dans le blé, l’avoine, les pois, les haricots, etc., tous les principes élaborés par l’activité chlorophyllienne sont utilisés à la formation des réserves de la graine, dans la pomme de terre ces principes émigrent vers les tiges renflées, vers les tubercules. Le chemin que suivent ces principes élaborés est facile à déterminer : si on pratique dans une tige de pomme de terre et dans le sens de la longueur une coupe assez mince pour être examinée au microscope, et qu’on imprègne celle coupe d’eau iodée de façon à colorer en bleu les grains de fécule, on voit ceux-ci épars, jalonnant les parois des vaisseaux les plus voisins de la partie extérieure ; ces vaisseaux se prolongent en dehors de la tige en un mince filet blanc, le stolon, qui se renfle bientôt en tubercules : c’est là que s’accumulent la fécule et en bien moindre proportion les matières azotées.

Il y a trente ans environ que j’ai essayé de montrer par une expérience schématique le mécanisme de l’accumulation de la fécule dans le tubercule de la, pomme de terre, de l’amidon dans le grain de blé : ces substances se forment dans les feuilles, mais elles ne s’y rencontrent jamais qu’en très minimes proportions. Comment cheminent-elles d’un organe à l’autre et finissent-elles par s’accumuler de façon à former les trois quarts du poids de la matière sèche soit dans le grain, soit dans le tubercule ? C’est là ce qu’il faut concevoir.

L’explication que j’ai donnée repose sur la découverte des phénomènes de diffusion, due au chimiste anglais Th. Graham.

  1. Voyez la Revue du 15 août 1894, p. 419.