Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 130.djvu/875

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
LE
THÉÂTRE ANGLAIS CONTEMPORAIN

III.[1]
HENRY IRVING. — LES DRAMES DE TENNYSON W. ARCHER ET LA NOUVELLE CRITIQUE


I

Pendant que Robertson essayait de ramener la comédie dans le domaine de la réalité et que Gilbert creusait laborieusement sa fantaisie, que devenait le drame « légitime » ? J’ai montré, dans un précédent article, à quel degré d’humiliation il était descendu, vers 1850. Les anciens théâtres privilégiés, dont il avait été la propriété exclusive, l’avaient abandonné, et, tombé dans le droit commun, les nouveaux théâtres dédaignaient de l’y ramasser. Les deux petites Bateman, âgées de 6 à 8 ans, excitaient, dans Richard III, la curiosité d’un public très naïf et très inculte, prompt à goûter ces exhibitions enfantines parce que lui-même, en littérature, était un peu enfant. Dans ces petites filles symboliques, Shakspeare se rapetissait pour être compris. Un acteur nommé Brooke faisait pis : il rendait Shakspeare presque ridicule. On se moqua de lui jusqu’au jour où l’on apprit sa fin héroïque sur un navire qui le portait en Amérique et qui fit naufrage : le pauvre tragédien n’avait rencontré la vraie tragédie que cinq

  1. Voyez la Revue du 15 juin et du 1er juillet.