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LA FAMILLE DE RUBENS

Sur la pierre tombale du père de Rubens, décédé à Cologne en 1587 et inhumé dans l’église Saint-Pierre de cette ville, on lisait une inscription portant qu’il « avait habité Cologne pendant dix-neuf ans et qu’il avait vécu avec sa femme durant vingt-six années dans une étroite union. » Sauf ce qui concerne la durée de cette union, il faut bien reconnaître qu’il y avait là autant d’inexactitudes que de mots. Le lieu de naissance de Rubens lui-même n’était pas d’ailleurs donné d’une manière plus véridique dans la notice que son propre neveu Philippe avait consacrée à son oncle — probablement d’après des notes laissées par Albert Rubens, le fils aîné du grand peintre — notice à laquelle de Piles emprunta les élémens de la biographie de ce dernier. À en croire les uns et les autres, Rubens serait né à Cologne en 1577. Peu de temps avant la publication de de Piles, dans quelques lignes placées par C. de Bie au-dessous du portrait de l’artiste (1649), la ville d’Anvers était, au contraire, indiquée comme lui ayant donné le jour, et après de Bie, Bellori, qui tenait aussi ses renseignemens de la famille de Rubens, Moreri dans son grand Dictionnaire historique (1674), Sandrart dans son Académie (1675) et Baldinucci dans ses Notizie (1686) disent également Rubens originaire d’Anvers. Ces deux courans d’affirmations contradictoires ont persisté presque jusqu’à nos jours, et avec cette manie de légendes absolument gratuites qui régnait dans la littérature artistique de la première moitié de ce siècle, des écrivains non seulement sont allés jusqu’à spécifier la maison de Cologne où Rubens serait né, mais sans s’arrêter en si beau chemin, d’autres ont imaginé que c’était précisément dans cette maison que Marie de