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vail produit par cette machine à la quantité de chaleur que le foyer lui cède, ne dépend ni de la nature des substances qui entrent dans la constitution de la machine, ni de l’agencement des organes qui la composent ; ce rapport ne dépend que des deux températures extrêmes entre lesquelles le cycle est décrit.

Aucune expérience ne vérifie directement l’axiome de Clausius ; si cet axiome peut être rendu probable, c’est seulement par les concordances que constatera l’expérimentateur, par la comparaison des faits observés avec les conséquences éloignées de la théorie à laquelle cet axiome sert de base ; ces caractères sont communs à toutes les hypothèses physiques ; celui qui analyse de près le mécanisme de la science les attribue même aux suppositions que l’on regarde habituellement comme des décalques de l’observation ; mais, tandis qu’un esprit superficiel peut aisément les méconnaître en celles-ci, ils éclatent, en cet axiome, aux yeux des moins attentifs ; aussi cette loi parut-elle tout d’abord, parmi les principes de la physique, comme douée d’une nature étrange, exceptionnelle ; aussi soûle va-t-elle bien des discussions. Les uns, avec Zeuner, voulaient y voir une vérité évidente d’elle-même, à la façon des axiomes de la géométrie ; Clausius leur répondait avec raison que l’on pouvait, sans absurdité, nier l’exactitude de son postulat, et que cette exactitude ne pouvait être établie que par les confirmations de l’expérience. Les autres, avec Rankine ou avec Hirn, croyaient trouver, soit dans les phénomènes de la chaleur rayonnante, soit dans des modifications compliquées, des faits qui fussent en désaccord avec la loi de Clausius ; mais celui-ci, discutant les objections avec une minutieuse rigueur, mettait à nu les confusions qui avaient induit ses émules en erreur. Affermi par ces diverses épreuves, le principe qu’un cycle de Carnot ne peut transporter de la chaleur d’un corps froid à un corps chaud, à moins que les forces extérieures ne fournissent un travail positif, finit par être admis sans conteste et, avec lui, les conséquences qui s’en déduisaient.


VIII


Lorsqu’une machine décrit un cycle de Carnot, le rapport entre le travail fourni par la machine et la quantité de chaleur qu’elle emprunte au foyer est indépendant de la nature et de l’agencement des corps qui composent la machine ; il ne dépend que des deux températures extrêmes entre lesquelles fonctionne la machine. D’ailleurs le travail produit par la machine est équivalent à l’excès de la quantité de chaleur empruntée au foyer sur