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toujours les bons nageurs qui se noient, parce qu’ils ont trop de confiance dans leurs forces et qu’ils n’ont pas la patience d’attendre sur l’épave qu’on vienne à leur secours. Le fait est possible, mais pour un nageur qui se noie par impatience, il y en a dix qui succombent en se dévouant pour sauver les autres, en portant à terre le bout de l’amarre qui doit être le salut de tous, ou bien en s’obstinant à rester près de ceux qui ne savent pas nager, pour les soutenir en attendant qu’on vienne à leur aide. Si ce sont toujours les mêmes qui se noient, tant pis pour les autres ! ce ne sont pas les braves qui meurent en faisant leur devoir qu’il faut plaindre, ce sont les malheureux qui sont dans l’impuissance de le remplir.

Les bains de nier, comme l’atmosphère maritime, n’ont pas les mêmes propriétés sur toutes les plages. Pour nous en tenir à la France, les stations de la Manche, qui sont les plus fréquentées, sont aussi les plus froides. A Dieppe, le docteur Gaudet a recueilli, pendant dix ans, des observations thermométriques pendant les mois de juillet, d’août et de septembre, époque à laquelle s’y rendent les baigneurs. Il a trouvé en moyenne 17°,6 pour l’atmosphère et 18°,2 pour la mer. La température de celle-ci monte lentement, descend de même, et n’est pas influencée sensiblement parcelle de l’air. En dix ans d’observation, l’écart n’a été pour l’eau que de 5 degrés (15 à 20 degrés), tandis que pour l’air il a été de 18 (10 à 28 degrés).

La température moyenne de la Méditerranée est de 4°,35 plus élevée que celle de l’Océan. En 1834, à Trieste, elle est montée à 30 degrés, comme entre les tropiques. Lorsqu’on s’y plonge, dans ces parages, on éprouve une agréable sensation de fraîcheur ; mais on peut y séjourner longtemps sans éprouver le second frisson qui indique le moment d’en sortir. Ces bains ne sont pas aussi toniques que ceux qu’on prend sur les plages de la Manche, mais on peut en user plus longtemps. Ainsi, au sanatorium de Giens, près d’Hyères, qui a été créé par le conseil général des hospices de Lyon, pour le traitement des petits scrofuleux de cette ville, on leur donne des bains à la l’âme pendant six mois consécutifs, depuis la fin d’avril jusqu’au commencement de novembre, et, quand le temps est beau, on les laisse jouer et barboter dans l’eau tout à leur aise. Il n’y a presque jamais d’interruption, tandis qu’à Berck-sur-Mer la saison ne dure que quatre mois, et les suspensions causées par le mauvais temps sont si fréquentes que les petits malades prennent rarement plus de 80 bains, et ces bains sont très courts : leur durée varie de deux à cinq minutes, suivant leur âge et le temps qu’il fait.