éprouvent le besoin d’aller respirer l’air des champs ; on le ressent également dans les petites localités où pourtant on n’a qu’un pas à faire pour trouver le calme des bois et l’aspect des prairies. Dans ce cas, il est un peu factice ; il répond plutôt aux exigences de la vanité qu’à celles de la santé, mais il n’en est pas moins intéressant par les conséquences qu’il produit.
Cet exode périodique a pour cause l’intensité croissante de l’activité dans toutes les carrières ; mais il dénote aussi le goût et l’intelligence du bien-être, qui sont deux choses différentes. Les hygiénistes ont contribué à vulgariser les notions que cette intelligence suppose, en faisant connaître au public les inconvéniens et les dangers des grandes agglomérations humaines pour ceux qui séjournent trop longtemps dans ce milieu artificiel. Ils ne peuvent que s’en féliciter.
L’émigration périodique d’une partie de la population des villes a d’abord les conséquences les plus heureuses au point de vue de la santé de leurs habitans et de la salubrité publique. C’est de la décentralisation pratique, c’est une dérivation momentanée du courant si fâcheux qui entraîne les paysans vers les villes et par suite duquel la population urbaine s’accroît sans cesse aux dépens de la population rurale. Il y a cinquante ans, on comptait trois paysans pour un citadin : aujourd’hui on en compte à peine deux. Assurément, l’émigration momentanée d’une partie des habitans des grands centres n’est qu’un remède bien insuffisant à cet état de choses ; mais il a cependant ses résultats : il opère un mélange entre les divers élémens de la population du pays, il leur apprend à se connaître et à s’apprécier ; enfin il répand dans les campagnes de l’argent et des notions utiles. Ce sont toutefois les immigrans qui en retirent le plus grand bénéfice. Après ce repos bien gagné, ils rentrent chez eux satisfaits, bien portans, et prêts à reprendre, avec un nouveau courage, le fardeau de leurs occupations habituelles.
Les villes de leur côté bénéficient de cette absence. L’encombrement y diminue ; la densité de la population, en s’abaissant, permet d’assainir les quartiers déshérités, et cet effet complexe se traduit par un abaissement du chiffre de la mortalité, plus considérable que celui qui résulterait de la simple diminution de l’effectif.
J’en ai fait le calcul pour Paris pendant l’année qui vient de s’écouler. En 1894, on n’a enregistré que 49 079 décès, tandis que la moyenne des quatre années précédentes s’élève à 54 812.