comme l’un des problèmes les plus importans que pût se proposer la physique expérimentale ; aussi cette question fut-elle mise au concours par l’Institut. En septembre 1812, deux manufacturiers, Desormes et Clément, soumirent un mémoire aux juges du concours ; non contens de faire connaître un certain nombre de chaleurs spécifiques de corps gazeux, ils développèrent, par le raisonnement et l’expérience, les idées de Lambert et de Dalton touchant les phénomènes thermiques qui accompagnent les changerons de volume des gaz. La nouveauté et la singularité des idées qu’ils proposaient, au sujet de la température, attirèrent sur leur travail « la défaveur des commissaires de l’Institut ». Ceux-ci couronnèrent le Mémoire de Delaroche et Bérard, qui renfermait seulement des déterminations expérimentales de chaleurs spécifiques ; ces déterminations cependant n’étaient pas plus exactes que celles auxquelles Desormes et Clément étaient parvenus. C’est seulement en 1819 que Desormes et Clément publièrent, dans le Journal de physique, de chimie et d’histoire naturelle, la pièce qu’ils avaient soumise à l’Institut en 1812. Ce mémoire, intitulé : Détermination expérimentale du zéro absolu de la chaleur et du calorique spécifique des gaz, mérite d’arrêter quelque temps notre attention.
La méthode calorimétrique imaginée par Black permet de mesurer la quantité de calorique qu’un corps gagne ou perd lorsqu’il subit une transformation d’une nature bien déterminée : échauffement ou refroidissement d’un certain nombre de degrés, fusion ou congélation, vaporisation ou condensation. Mais quelle est la quantité de chaleur que renferme un corps donné, pris dans un état donné ? Combien y a-t-il de calorique, par exemple, dans un kilogramme d’eau, à la température de la glace fondante ? Voilà une question que les méthodes calorimétriques ordinaires ne permettent pas de résoudre.
C’est cette question qu’abordent Dalton d’abord, Desormes et Clément ensuite. Ils se proposent de déterminer la valeur absolue de la masse de calorique qu’un corps donné contient à chaque température ; de déterminer, par conséquent, à quelle température le corps ne renfermerait plus aucune quantité de calorique. Parvenu à cet état, le corps ne pourrait plus se refroidir davantage ; il aurait atteint le zéro absolu de température. Si nous supposons tous les corps amenés à ce point où ils ne contiennent plus de calorique, disent Desormes et Clément, « il ne nous reste de toute la Nature qu’une image extrêmement différente de celle que nous avons sous les yeux; non seulement la vie n’existe plus dans ce triste univers dont nous pouvons nous faire