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la question. De Luc montre qu’il faut toujours à peu près la même quantité de chaleur pour faire monter le thermomètre à mercure d’un degré, quel que soit ce degré.

De la méthode des mélanges, Black allait, en 1762, tirer une découverte encore plus importante.

Prenez une livre de glace au moment où elle commence à fondre et où, par conséquent, sa température est 0° ; plongez-la dans quatre-vingts livres d’eau portées à 1° ; la glace va fondre, l’eau se refroidir ; au bout d’un certain temps, la glace aura entièrement disparu et il restera quatre-vingt-une livres d’eau ; le thermomètre, plongé dans cette eau, marquera exactement 0°.

Les quatre-vingts livres d’eau que nous avions prises à la température de 1°, se refroidissant de 1° à 0°, ont abandonné, nous le savons, quatre-vingts unités de chaleur ; qu’est devenue cette chaleur ? La livre de glace que nous avions prise s’est transformée en une livre d’eau, mais sa température n’a pas changé ; elle était 0° avant l’opération, elle est 0° après. Ainsi, une livre de glace, en fondant, absorbe une quantité de chaleur considérable, une quantité mesurée par le nombre 80, et cela sans que sa température varie. Inversement, une livre d’eau à 0°, se convertissant en une livre de glace également à 0°, dégage quatre-vingts unités de chaleur.

L’observation de Black expliquait de la manière la plus heureuse une ancienne expérience que les académiciens de Florence avaient exécutée sans l’interpréter. Ils avaient rempli un vase de glace pilée très fine et, y ayant mis un thermomètre, l’avaient laissé prendre la température du bain ; puis, plongeant le vase plein de glace dans l’eau bouillante, ils avaient remarqué que la chaleur faisait fondre la glace tandis que le thermomètre demeurait stationnaire ; la chaleur de l’eau bouillante était absorbée par la glace qui repassait à l’état liquide sans que le thermomètre en ressentît aucun effet.

Black put observer que les autres corps solides, en fondant, absorbent, comme la glace, une certaine quantité de chaleur sans que leur température éprouve de changement ; que la vaporisation de l’eau, des autres liquides, est également accompagnée d’une grande absorption de chaleur, bien que la vapeur ne soit pas plus chaude que le liquide.

L’observation de Black fournissait un nouveau moyen d’évaluer les quantités de chaleur ; toutes les fois qu’un corps, en se refroidissant ou en éprouvant quelque autre modification, fait fondre une livre de glace prise à 0°, on sait qu’il a abandonné quatre-vingts unités de chaleur ; de ce principe, Wilcke, en