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heureusement adopté par le gouvernement, en vertu duquel les droits de douane sont remboursés aux exportateurs, il est possible à nos commerçans de lutter, sur le marché international, pour la vente de produits manufacturés à l’intérieur avec des matières premières venues de l’étranger ; le chocolat par exemple. Il est souhaitable que les facilités offertes par l’administration soient encore étendues. Ainsi le café français est estimé dans bien des pays où cette denrée est l’objet de sophistications nombreuses ; on s’accorde à reconnaître au nôtre des qualités précieuses : une torréfaction mieux faite, un mélange plus intelligent des espèces. Comme il supporte à l’état vert un droit d’entrée de 150 francs par 100 kilos, augmenté d’un quart par le brûlage, la réexpédition du café ne pourrait s’opérer que sous bénéfice d’une déduction de (axe qui, jusqu’à présent, n’est pas admise.

L’exportation, qui dans la maison Potin est encore en enfance, — elle ne dépasse pas 1 million, — s’était, durant les premières années, soldée en perte. Il faut en effet, pour des alimens destinés à des contrées lointaines, à des climats très différens du nôtre, une fabrication et un conditionnement spécial. Le sucre doit être enfermé dans de solides boîtes en fer-blanc qui le mettent à l’abri des insectes et de l’humidité ; les conserves sont l’objet, pour assurer leur conservation dans les pays chauds, de précautions multiples. L’usine de la Villette disperse aujourd’hui ses caisses aux quatre points cardinaux : la Réunion, Port-au-Prince, la Nouvelle-Orléans ? Santiago de Cuba, le Congo font des commandes journalières. Nos explorateurs, nos missionnaires, notre armée coloniale ont recours à ces envois de la métropole ; nombre de colis, au moment de ma visite, étaient on partance pour Madagascar.


IV

Le point capital, pour un magasin de nouveautés, est de n’avoir qu’un stock de marchandises relativement faible et de le renouveler sans cesse. C’est, — on l’a vu, — l’une des bases de l’organisation des grands bazars : ils font ainsi produire un intérêt renouvelé à l’argent qui traverse leur caisse, aux articles qui traversent leurs rayons, pendant qui ; les petites maisons, où la vente est plus lente, immobilisent des fonds proportionnellement bien plus importans. Pour l’alimentation c’est le contraire : l’art de l’épicier modeste est de n’avoir que très peu de denrées à la fois. Il lui faut moins de place ainsi, partant un loyer moindre ; il a peu de dettes et se procure des marchandises plus fraîches. Tel est le bon côté ; le mauvais, c’est qu’achetant par portions