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12 calibres, pesant 5 tonnes environ et lançant un obus de 90 kilogrammes, dont la trajectoire courbe menacera le pont du bâtiment ennemi, et par conséquent aussi l’appareil moteur et les soutes à munitions.

A qui, s’étonnant du choix de cette pièce, émettrait quelque doute sur l’efficacité de son tir à la mer, nous nous bornerions à citer le combat du cuirassé turc Assar-I-Chevket, et du croiseur auxiliaire russe Vesta armé de mortiers de neuf pouces. Canonné par son puissant adversaire, le commandant Baranof ouvrit le feu de ses mortiers, dont il rectifia peu à peu le tir. Un de ses obus démonta la pièce de chasse de l’Assar-I-Chevket, et le dernier, atteignant une des chaudières après avoir percé tous les ponts, obligea l’ennemi à stopper.

L’adjonction du canon de 14 centimètres et de l’obusier de 20 à notre batterie de 10 centimètres portera le poids total de l’artillerie et de ses accessoires à 235 tonnes environ. Avec les armes légères nous n’atteindrons pas 250 tonneaux, et nous resterons ainsi à 2 pour 100 du déplacement total, proportion très inférieure à celle qu’accusent les devis de la plupart des navires de guerre pour l’armement offensif.

Occupons-nous maintenant de l’armement défensif.

On n’attend pas sans doute que nous dotions notre croiseur d’un blindage de flanc ; mais peut-être jugerait-on convenable de protéger ses machines par une légère cuirasse horizontale. En vérité, nous hésitons à reconnaître la nécessité de ce mode de défense pour un navire appelé à combattre de loin des adversaires armés de bouches à feu de puissance moyenne, et qui ne fournissent pas des feux plongeans. Bien suffisante, nous semble-t-il, surtout après certaine épreuve faite au combat du Yalu, serait la résistance opposée aux projectiles de calibre moyen par un épais matelas de charbon disposé, entre deux fortes tôles d’acier, autour de l’appareil moteur.

Nous ne restons pas insensibles, en revanche, au danger des coups d’enfilade qu’un puissant croiseur pourrait adresser au nôtre, avant que la vitesse de ce dernier l’eût mis hors de la portée pratique des lourdes pièces de chasse. Une cloison transversale de 12 centimètres d’épaisseur, placée à l’arrière, suffirait pour provoquer l’explosion immédiate d’un obus de 23 centimètres animé d’une vitesse restante de 300 mètres au plus, et mettrait les parties vitales du preneur de paquebots à l’abri de tout dommage essentiel.

Quant à la protection du personnel, nous ne pouvons avoir la prétention de la rechercher que dans la mesure où l’on s’en