à côte, pour le plus grand profit de nos jambes, de nos yeux et de nos esprits ? A vrai dire, plus vont les choses, moins le bon public peut voir, dans cette séparation de corps (qui a produit, dans la pratique, de sérieuses améliorations, sur la rive droite comme sur la rive gauche), une véritable question de principes, une lutte convaincue d’écoles et de systèmes. Au Champ-de-Mars, où les élèves du dur Meissonier continuent à se mêler aux disciples du tendre Puvis, l’on peut bien constater une tendance générale à chercher la qualité première de la peinture dans la tenue harmonique et dans l’unité calme de la coloration ; néanmoins, cette tendance n’y est point exclusive et la plupart même de ceux qui l’ont d’abord préconisée à outrance s’efforcent de donner à leurs harmonies des dessous plus résistans et plus corrects, d’après les traditions naguère démodées que les maîtres des Champs-Elysées avaient l’enfantillage de soutenir. Aux Champs-Elysées, où l’on a réussi à maintenir, dans l’intérêt des générations nouvelles, le culte de la composition réfléchie et celui des formes justes et pleines, nous ne voyons pas que ces préoccupations nécessaires empêchent les innovations les plus diverses et les plus hardies, dans tous les sens, et les affolés de modernisme, en fait de niaiseries symbolistes ou de naturalisme ordurier, ne s’y trouvent guère plus gênés qu’ailleurs pour exprimer, en des langages spéciaux, leurs confuses aspirations ou leurs sensations grossières. En réalité, il n’y a qu’une école française, troublée, agitée. inquiète, tâtonnant de droite et de gauche, aussi bien là-bas qu’ici près, sans but arrêté, sans parti pris décidé, où qu’on l’examine et où qu’on la prenne ; de tous les côtés aussi il y a une école laborieuse, vivante, ambitieuse, qui aboutira demain si elle ne le fait pas aujourd’hui, et qui conserve, malgré tout, au milieu des étrangers, nourris par elle, qui l’assiègent et qui l’envahissent, des qualités de race, une conscience du métier, une franchise d’observation, une clarté d’expression qui la feront sortir, à son honneur, de cette crise passagère. Examinons d’abord les Français dans les deux Salons, nous verrons ensuite les étrangers.
Les facultés les plus sérieusement atteintes par les théories paradoxales dont ils commencent à revenir ont été, chez nos peintres, les facultés imaginatives, celles qui sont nécessaires à l’exercice de la peinture monumentale, décorative ou historique. Ce n’est pas qu’on n’ait chanté, plus que jamais, à tue-tête et pardessus les toits, des hymnes en l’honneur de l’art décoratif. Ne semblait-il pas à plus d’un qu’il venait, le matin même, d’en