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« … J’ai lu votre livre magnifique. Je lis et je médite. Vous traduisez Sophocle comme Sophocle vous traduirait.

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Victor Hugo. »


« Cher poète,

« Nous tendons au même but, crions : « Lumière ! lumière ! » levons à l’horizon dans l’aurore le divin drapeau de l’idéal. C’est là votre fonction, vraie fonction sacerdotale, digne d’un généreux et profond esprit comme le vôtre.

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Victor Hugo. »



« … Vous êtes un Maître et vos paroles me touchent profondément. Je sens ma pensée d’accord avec la vôtre, c’est une douceur et une fierté pour moi.

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Victor Hugo. »


Leconte de Lisle n’en fut pas moins touché de la persistance avec laquelle Victor Hugo lui préparait une place sous la coupole ; et parmi tant de lettres banales, il aimait à trouver une preuve de la sincérité de Hugo dans ce billet daté du 9 juin 1877 :

« Mon éminent et cher confrère,

« Je vous ai donné trois fois ma voix, je vous l’eusse donnée dix fois. Continuez vos beaux travaux et publiez vos nobles œuvres qui font partie de la gloire de notre temps. En présence des hommes tels que vous, une Académie, et particulièrement l’Académie française, devrait songer à ceci : qu’elle leur est inutile et qu’ils lui sont nécessaires.

« Je vous serre la main.

Victor Hugo. »


Les sentiments de Leconte de Lisle pour Victor Hugo étaient un mélange de vif enthousiasme pour le poète, et de médiocre estime pour le penseur, le lettré et le savant. Lui, qui poussait jusqu’à l’extrême le souci de reproduire exactement les mœurs, les idées, l’âme des divers peuples dont il s’occupait, il était choqué de l’indifférence absolue que Hugo affectait pour ces matières. Il ne lui pardonnait pas sa profonde ignorance des questions historiques et scientifiques. Il lui en voulait de sa vanité, de sa recherche de la popularité, de ses concessions, allant jusqu’à la faiblesse, sur le terrain politique ; enfin il reprochait à Hugo sa séche-