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rassurer les contribuables, sans leur sacrifier néanmoins les droits et intérêts du Trésor ; qu’il procéderait, comme il le faisait pour les patentes, sans soulever plus de réclamations, et que, le plus souvent, il s’en rapporterait aux affirmations des autorités locales intéressées, pour maintenir le produit des centimes communaux, à ne pas se prêter à une diminution du principal perçu pour le compte de l’Etat ; que peut-être, en matière électorale, les décisions des Conseils de préfecture avaient pu exciter quelque défiance, mais jamais en matière administrative ; que sans doute l’appréciation exacte du loyer était chose très difficile dans les communes rurales, mais que, dans le régime de répartition, les contingens, une fois fixés, ne pouvaient plus être modifiés de longtemps, tandis que le mode de quotité, permettant de corriger chaque année les évaluations inexactes, présentait sous ce rapport des avantages incontestables. À ces considérations toutes d’exécution, les membres de la majorité ajoutèrent que la répartition actuelle des trois impôts personnel, mobilier et des portes et fenêtres, était tellement défectueuse qu’il y aurait injustice à ajourner le redressement d’inégalités contre lesquelles s’élevaient des plaintes si unanimes et si légitimes : que le régime le plus propre à corriger les inégalités et à en prévenir le retour était celui de quotité, parce qu’il permettait de suivre dans leurs variations continuelles les valeurs locatives ; qu’il donnerait un surplus de produit annuel de 27 millions par la seule et exacte application des tarifs existans ; et que ce surplus était d’autant moins à dédaigner qu’il couvrirait d’une façon bien opportune le vide laissé dans les revenus du Trésor par la remise consentie sur les boissons. La commission concluait donc, par l’organe de son rapporteur, M. Saunac, à l’adoption du projet de loi.

La discussion fut longue et vive dans la Chambre des députés. Les membres favorables aux propositions ministérielles soutinrent que l’impôt de quotité avait le grand avantage de suivre la marche de la fortune publique, d’augmenter et de diminuer avec elle, et par conséquent de maintenir l’égalité proportionnelle entre les contribuables ; que l’impôt de répartition, au contraire, ne pouvant être modifié qu’à de rares intervalles, l’injustice et l’arbitraire augmentaient chaque jour à raison des variations souvent en sens inverse que subissait dans ses valeurs la matière imposable sur les diverses parties du territoire ; qu’en tous cas, l’état actuel, défectueux à son origine et devenu pire avec le temps, ne pouvait être maintenu ; que dès lors, en admettant que le régime de répartition fût conservé, il faudrait nécessairement, pour corriger les irrégularités dont il était entaché, recourir à des recensemens et investigations contre lesquels se défendraient