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renouvelée se perd, où le petit groupe propulseur se fond dans la ligne, où celle-ci vient à stopper à nouveau. De nouveaux groupes devront entrer alors en ligne pour déterminer de nouveaux élans jusqu’à ce que la troupe assaillante ait enfin franchi la zone terrible et soit parvenue à distance d’assaut.

Si la première phase de l’action est celle de la dispersion raisonnée, de l’échelonnement méthodique en profondeur, cette deuxième est celle du resserrement progressif, de l’entrée successive en ligne des groupes compacts restés tout d’abord en arrière de la chaîne.

Reste l’assaut final. La ligne des tirailleurs poussée par ses soutiens est arrivée à 250 mètres de la position de la défense : il faut l’y faire pénétrer maintenant et l’y jeter avec une force suffisante pour en chasser l’adversaire. Ce sera le rôle de la réserve. Il faut ici une impulsion plus énergique, quelque chose qui imprime à l’attaque un caractère de résolution irrésistible : une forte troupe à rangs serrés est seule capable de produire cet événement.

Le chef a eu soin de conserver sa réserve bien groupée ; elle s’est glissée, à l’abri des coups et des vues, aussi presque possible des combattans. Son heure est venue. Elle surgit tout à coup vis-à-vis du point qu’elle doit enlever. La voilà qui s’avance d’un pas ferme et assuré, dans un ordre qui affirme nettement son sang-froid, la parfaite assurance de sa force, sa résolution de vaincre. Elle ne se cache plus, elle ne dissimule plus sa marche ; elle s’avance à découvert, le front haut, enseignes déployées. A sa vue, à son exemple, les tirailleurs se lèvent, les baïonnettes jaillissent des fourreaux : c’est l’assaut, c’est l’acte suprême !

Puisque le combat d’infanterie comportait ainsi trois phases distinctes, il a paru logique aux auteurs du règlement de 1884 de diviser la troupe qui doit les parcourir d’avance en trois échelons correspondans. Voilà pourquoi la troupe assaillante comprend, dès l’abord, une ligne de tirailleurs, une ligne de soutiens, une réserve.

Chacun de ces trois échelons a dans le combat son rôle particulier bien défini ; il fait partie d’un ensemble ; c’est une fraction d’un tout. Si, d’un autre côté, on veut bien considérer que la compagnie n’aura guère plus de 200 hommes à mettre en ligne, on sera aisément convaincu qu’elle sera impuissante à fournir les trois échelons. Son effectif est trop faible pour se prêter à cette répartition ; ce serait l’émiettement et non le fractionnement.

La première unité qui soit assez forte pour pouvoir se fractionner en trois échelons, c’est le bataillon.

Dans le combat du bataillon, les quatre compagnies