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Rentré à Berlin au début de l’année 1879, il se prépare à la grande lutte qui s’annonce au Reichstag. Le discours du trône du 12 février 1879 contient une critique de la politique commerciale suivie par l’Allemagne depuis 1865 et l’annonce d’une évolution en sens opposé :

« Je considère, disait l’empereur, qu’il est de mon devoir de m’efforcer d’agir de façon que le marché allemand soit conservé à la production nationale dans la mesure compatible avec nos intérêts généraux. Il convient à cet effet que notre législation douanière se conforme de nouveau aux principes éprouvés sur lesquels le Zollverein a reposé pendant un demi-siècle et dont nous nous sommes écartés depuis 1865. Je ne saurais confesser que ce changement de notre politique douanière ait eu d’heureux résultats. »

Le plan de réformes soumis au Reichstag proposait à la fois des droits fiscaux et des droits protecteurs. Bluntschli, le célèbre professeur de Heidelherg, déclarait au printemps de 1879 (Deutsche Revue) qu’il fallait rendre l’Empire ; indépendant, faire cesser toutes les contributions matriculaires, et y arriver par l’élévation des impôts des douanes et de consommation, en particulier sur le tabac. Le mouvement était ainsi mené à la fois par les partisans de l’unité, désireux d’asseoir sur des bases définitives les finances impériales, et par les protectionnistes, qui ne manquèrent pas de rééditer les vieilles erreurs de la balance commerciale, de montrer l’Allemagne envahie par les produits étrangers, l’importation dépassant l’exportation de près d’un milliard. Les tableaux de la douane n’en continuèrent pas moins, après le vote des tarifs, d’enregistrer des différences dans le même sens : en 1891 encore, l’importation était de 4 403 millions contre une exportation de 3 340 millions de marks.

Le tarif voté le 12 juillet 1879 rétablit les droits sur les bois et les céréales supprimés depuis 1864, met un droit sur le pétrole, élève les droits sur le café, le vin, le riz, le thé, etc. ; il élève et généralise les droits sur le bétail, rétablit les droits sur les fers, supprimés deux ans auparavant augmente les droits d’entrée sur les tissus et sur beaucoup de marchandises, entre autres le tabac : en même temps la taxe interne sur cette plante est considérablement accrue. De 1881 à 1884 il ne fut pas apporté de modification à cet ordre de choses. Mais en 1885 les droits sur les céréales furent triplés, ceux sur les bois doublés, et beaucoup d’autres majorés dans des proportions diverses. En 1887 les droits sur les céréales montèrent encore une fois dans la proportion de trois à cinq.

Alors que le parti protectionniste se vantait d’avoir ainsi