Page:Revue des Deux Mondes - 1895 - tome 128.djvu/477

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

l’exécution. » Rien n’a vieilli dans ce langage, et on n’en a jamais parlé de meilleur à aucune tribune : il n’y a pas aujourd’hui un seul mot à y changer. On ne saurait trop regretter que M. de Serre ait échoué en 1819. Sa proposition a bien été votée par la Chambre des députés, mais elle a été repoussée par la Chambre des pairs, et cela pour des motifs exclusivement politiques. S’il en avait été autrement, la physionomie même de notre histoire parlementaire aurait pu en être modifiée. Au lieu des longues sessions, qui remplissent l’année tout entière, nous en aurions eu d’une durée plus normale, c’est-à-dire plus courte, ce qui ne les aurait pas empêchées d’être aussi bien remplies. Le gouvernement parlementaire n’y aurait rien perdu, bien au contraire. On ne saurait nier que la manière dont nous le pratiquons depuis quelques années n’a augmenté ni sa popularité, ni son prestige. La quasi-permanence du Parlement lui a donné une facilité de plus pour empiéter sur tout et imposer partout ses exigences. La continuité, et souvent l’inutilité bruyante de son effort lassent le pays : un homme au repos se fatigue à regarder Sisyphe. Il n’est pas douteux que, si on pouvait arriver à clore la session à la fin de juin et à ne la rouvrir qu’en novembre, tout le monde y gagnerait. En 1884, la tentative faite par M. de Serre a été reprise par un ministre qui avait peu d’analogie avec lui, M. Peytral. Une fois de plus, la réforme, votée par la Chambre, a été rejetée par le Sénat. Mais aujourd’hui les circonstances sont changées. Le gouvernement n’aurait sans doute plus à lutter que contre des objections secondaires : elles sont à notre avis de mince valeur, et tout porte à croire qu’il ne faudrait pas une grande force de logique pour en venir à bout.

La réforme, toutefois, ne produira tous ses résultats utiles que si les Chambres futures renoncent à faire de la discussion du budget une véritable encyclopédie en action ou, pour mieux dire, en discours. L’Angleterre a un budget aussi important et aussi compliqué que le nôtre : elle le discute en quatre mois. À la vérité, certaines parties en sont permanentes et ne sont pas remises en question chaque année. Mais enfin, du 1er janvier au 30 juin il y a six mois, et cette durée est suffisante, même avec les vacances inévitables, pour discuter très sérieusement un budget quelconque. Le danger subsiste de ne pas aboutir à temps ; il se résout par le vote de douzièmes provisoires ; mais il est certainement moins grave à la fin de juin qu’à la fin de décembre. Nos députés n’éprouvent aucun déplaisir à passer l’hiver à Paris ; ils verraient, au contraire, un très grand inconvénient à y passer l’été. Il serait alors presque impossible de voter, comme on le fera cette année, quatre douzièmes successifs, parce que cette obligation imposerait à la Chambre celle de siéger en juillet, août, septembre et octobre, éventualité à laquelle aucune Chambre ne se résignera jamais. Les longs et quelquefois éloquens