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DE LEOBEN A CAMPO-FORMIO

I.
LES PRÉLIMINAIRES DE PAIX

En identifiant l’établissement définitif de la République et le gouvernement de la France par le parti républicain, avec la conquête des limites naturelles, le Comité de salut public de l’an III et la Convention s’étaient engagés à vaincre l’Europe ou à la diviser par des associations de partage ; à isoler l’Angleterre ; et à la contraindre, par l’invasion, la révolution et la ruine, de subir une paix qui donnerait à la France le port d’Anvers et lui livrerait la Hollande. C’était la guerre ; cette guerre, par cela même qu’elle suspendait au sort des armées les destinées de la République, préparait nécessairement la suprématie du général, victorieux et pacificateur, qui réaliserait ce grand rêve national : la limite du Rhin et la fin de la Révolution. En désignant Bonaparte pour imposer, par les armes, la domination de la majorité conventionnelle, dans les nouveaux conseils ; en l’appelant au premier poste de l’armée de l’intérieur ; en lui confiant le commandement de l’armée d’Italie, destinée à porter contre l’Autriche les coups décisifs, le Comité de salut public l’avait désigné pour être cet homme-là. Avant que Bonaparte eût conçu l’ambition de s’emparer du pouvoir, il vit les avenues du pouvoir s’ouvrir devant lui ; ses victoires en Italie, son habile et fructueuse exploitation de ses conquêtes, firent de lui, en quelques semaines, le premier personnage de l’État, le connétable de la République et l’archi-trésorier du Directoire. Son prestige grandit d’autant plus que, du