« Vive la France! « Et je trouve, comme hier, qu’on a bonne façon en Espagne.
15 septembre.
Depuis deux jours, trois choses curieuses, et c’est beaucoup. La première, cependant, m’a causé une légère désillusion. On m’avait dit : « Ne manquez pas la fête de Lezo, le 14 septembre. Tout le pays basque s’y rend. Les pèlerins allument du feu dans l’église, pour y plonger la mèche des cierges achetés par centaines; les vieux costumes abondent; les danses sacrées des enfans, sur le parcours de la procession, ramènent l’esprit vers les âges primitifs... enfin, ne manquez pas Lezo. » J’y suis allé. Hélas ! nous sommes nés trop tard pour jouir d’un certain pittoresque du monde. L’homme perd, sans lutter même, et partout en même temps, le sens des antiques usages et cette sorte de goût supérieur, fait de poésie et d’orgueil, qui avait choisi pour chaque race et pour chaque climat, pour une bourgade que séparait d’une autre un ruisseau de deux mètres, la coupe, la couleur et l’étoffe du vêtement. De tant de traits extérieurs qui faisaient d’un peuple un individu, et le distinguaient d’un autre, au seul aspect, combien subsistent? Quatre à peine: les voitures, les bateaux, les cimetières et les coiffures. Voilà pourquoi, parmi les pèlerins de Lezo, venus à pied, en chemin de fer ou en tramway, rien ne me parut bien digne de remarque. Les bérets bleus m’étaient connus ; la procession ne sortit pas ; le feu n’est plus allumé dans l’église depuis plusieurs années. Mais le village vaut une visite.
Il est situé au delà de Passage, vers la frontière française, sur des vagues de terre qui longent les montagnes. L’église, très vaste, haute de voûte et sans clocher, occupe le sommet d’un mamelon. Tout près, en contre-bas, séparée d’elle par un chemin, une petite chapelle renferme la vieille image du Christ, vénérée dans les provinces basques d’Espagne et de France. C’est là que le peuple se réunit, le jour de l’Exaltation de la Sainte-Croix. Il entend une grand’messe en musique, un sermon en langue euskarienne, offre des ex-voto, puis, s’il n’y a pas de procession, comme aujourd’hui, achète, sur la place, des gâteaux de pâte dure pétrie avec du miel et recouverte de sucre, et va danser les danses du pays à Renteria, de l’autre côté de la rivière.
Quand j’arrive devant la baie sombre de la porte, que barre, jusqu’à moitié, la foule brune des hommes, et qu’étoile au-dessus