A quelques semaines d’intervalle, l’Angleterre a perdu deux de ses meilleurs écrivains, Walter Pater et James Anthony Froude. Le premier faisait métier de critique, l’autre d’historien ; mais tous deux étaient surtout des artistes. Dans la critique et dans l’histoire, ils ne voyaient qu’un prétexte au libre développement de leur fantaisie poétique. Et ainsi leurs œuvres nous paraissent aujourd’hui parentes : remarquables surtout, l’une et l’autre, pour leurs précieuses qualités d’imagination et de style.
En signalant ici, il y a quatre mois, la mort de Walter Pater, je prévoyais bien que les Revues anglaises me fourniraient une occasion prochaine de revenir plus longuement sur l’œuvre et la personne de ce grand écrivain. Et il n’y a guère de ces Revues, en effet, qui n’aient consacré un article à la mémoire de Pater. Le fellow d’Oxford, le dilettante qui toujours avait vécu et travaillé à l’écart de la foule, a été honoré après sa mort à l’égal des maîtres les plus renommés. On a raconté sa vie, énuméré le détail de ses habitudes et de ses manières. Des controverses, même, se sont produites à son sujet : on a discuté les dates de certains de ses Essais, comme s’il se fût agi de graves événemens historiques. Et ses confrères de la critique, et ses amis, et ses