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la France, dans ces deux expressions de l’idée esthétique, une invention plus vivace, une logique plus serrée, plus soutenue et plus continuellement renouvelée. M. Louis Gonse, étudiant l’architecture dans un précédent ouvrage, l’Art gothique[1], avait montré que cet art fondamental est la marque la plus certaine et la plus caractéristique du génie particulier d’un peuple, tandis que la sculpture se présente comme son complément, puisque la statuaire n’est jamais plus grande que quand elle soutient l’architecture et est associée à ses combinaisons. Aujourd’hui il développe cette idée dans ce nouveau volume : la Sculpture française du XIVe au XVIe siècle[2], et nous fait assister à l’éclosion de la sculpture nationale et monumentale et à son évolution, de l’époque gothique à nos jours, en passant par Jean Perréal, Michel Colombe, les Juste et Pierre Bontemps, — Jean Goujon, Germain Pilon, — Barthélémy Prieur, les Anguier, Girardon, Coysevox, Puget et les Coustou, — Pigalle, Falconet, les Adam, Bouchardon, Clodion et Houdon, — enfin les maîtres contemporains, dont quelques-uns peuvent être mis sur le même rang que leurs illustres devanciers. Dans cette revue de la sculpture française, il n’est pas une œuvre qui ne soit discutée avec le jugement et le goût le plus sûr, pas un artiste dont la vie et le talent ne donnent lieu aux plus intéressans commentaires. Avec ses splendides reproductions, l’ouvrage est des plus luxueux et fait honneur aux éditeurs, qui ont déjà donné sur la Renaissance en France[3], par M. Léon Palustre, la plus belle publication connue et réuni la plus riche bibliothèque de livres d’art, qui se complète aujourd’hui par la Peinture en Europe de MM. Georges Lafenestre et Eugène Richtenberger, dont les deux premiers volumes sur le Louvre et Florence[4] ont déjà paru.

Et ce n’est pas s’éloigner beaucoup de la Renaissance que de parler d’un artiste d’un grand talent qui s’en rapproche par l’élégance de ses compositions, à qui sa science profonde de la décoration, son goût sûr, la grâce de son dessin et son activité féconde semblaient devoir assurer un juste renom, s’il ne s’était complu, à l’exemple de quelques maîtres célèbres, dans l’obscurité, s’abstenant résolument de tout contact avec la foule, se gardant bien d’exposer aux Salons annuels et ne vivant que pour son art, heureux seulement d’être connu et apprécié par un petit nombre d’amateurs éclairés et compétens. Il a fallu qu’une partie des œuvres de P.-V. Galland fût exposée récemment au Musée des Arts décoratifs pour que sa valeur fût mise en

  1. L’Art gothique, par M. Louis Gonse, 1 vol. in-folio illustré; May et Motteroz.
  2. La Sculpture française du XIVe au XVIe siècle, par M. Louis Gonse, 1 vol. in-folio illustré de gravures hors texte et en taille-douce; May et Motteroz.
  3. La Renaissance en France, par M. Léon Palustre, 3 vol. in-folio, illustrés ; May et Motteroz.
  4. La Peinture en Europe. — Florence. — Le Louvre, par MM. Lafenestre et Richtenberger, 2 vol. in-8o avec illustrations ; May et Motteroz.