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ROSES D’HIVER


J’ai passé ce dernier dimanche de l’année
Dans le jardin d’une humble église abandonnée,
Débris roman jeté sur un cap provençal,
Et qui s’en va, croulant au souffle du mistral.
L’étroit jardin qui fut jadis un cimetière.
Tout planté d’oliviers, dormait sous la lumière
D’un tendre ciel d’hiver voilé languissamment.
Et c’était sous mes yeux un horizon dormant
De coteaux, où les pins dressaient un noir feuillage,
De golfes, où les flots bleuissaient sur la plage.
D’îles, qu’enveloppaient d’immobiles vapeurs...

Mais dans ce vieux jardin les palpitantes fleurs
D’un rosier exhalaient leur senteur fraîche et pure ;
Et ce vague soupir de l’immense nature
Me parlait de printemps par ce jour gris d’hiver
Insinuant l’espoir dans mon cœur, tout amer
De trop sentir la fuite invincible des choses...

O charme ami ! Douce âme innocente des roses !


Hyères.


MAISON CLOSE


Cette villa, si blanche au bord des flots si bleus.
Avec les frêles fleurs de ses rosiers frileux,
Avec ses oliviers aux pâlissans feuillages,
Et ses eucalyptus frémissans et sauvages,
Et la noire beauté de ses sombres cyprès.
M’attira par un charme, et, venu tout auprès
Je pus lire au-dessus de sa porte fermée
Le prénom d’une femme autrefois trop aimée
Et qui dort aujourd’hui son repos éternel
Au bord d’une autre mer et sous un autre ciel…


Hyères.