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MADAGASCAR
ET LA COLONISATION FRANÇAISE

Il y avait depuis deux cent cinquante-deux ans une question madécasse. Elle n’avait jamais été résolue, sauf pendant un instant, au siècle dernier, par un aventurier semi-polonais, semi-hongrois, échappé des prisons du Kamtchatka : jeté dans la grande île africaine, le comte Beniowski s’y fit accepter des naturels, établit solidement son pouvoir, vint en faire hommage au roi de France, fut éconduit par les ministres du roi, et finalement, à son retour dans l’île, tué par les soldats du roi. Ces soldats étaient dépêchés par le gouverneur de Bourbon pour faire cesser le scandale, si contraire à la coutume de France, d’un homme qui accomplissait sans l’autorisation des administrations compétentes une tâche où tous avaient échoué jusqu’alors. C’était en 1784. La question madécasse se rouvrit, et de nouveau, pendant plus d’un siècle, on essaya de la résoudre par des traités toujours déchirés, par des velléités d’action, par des coups de canon infructueux, par l’indifférence, ou par les bons offices des méthodistes anglais. Cette question bicentenaire est arrivée à l’état aigu en novembre 1894; elle sera définitivement résolue, nous en avons la promesse, dans l’été de 1895. Le gouvernement de la République a décidé d’engager une action décisive au printemps prochain ; il a jugé que le manque de foi des Hovas lui en donnait le droit et que les sévices exercés par ce peuple contre nos nationaux lui en faisaient un devoir. La Chambre des députés vient de voter un envoi de troupes et un premier crédit d’argent.

Je n’ai pas à m’étendre sur les dernières phases de la question de Madagascar, sur le détail des mesures adoptées pour la trancher, sur les débats soulevés par ces mesures. Le lecteur trouvera certainement de sages et claires explications sur tous ces points dans la chronique de la Revue. Je ne veux pas davantage