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La condition pour être admise dans ces excellentes pensions est, outre une moralité irréprochable, le fait de ne pas gagner au delà d’une somme déterminée. Il y a des homes de toute catégorie, il y en a même pour les dames qui se livrent à des travaux intellectuels ; the ladies’ Christian Union, la maison mère, dans un beau quartier, peut contenir 85 pensionnaires, et elle est toujours pleine ; le prix de la pension passe à la table et au ménage, les autres frais sont à la charge des fondatrices. Une branche de cette maison est spécialement consacrée aux employées de magasins. — Il y a même des homes pour les toutes jeunes filles qui s’acquittent par le travail domestique. Elles apprennent à se servir de la machine à coudre, elles s’exercent à blanchir et à raccommoder.

Les ouvrières sans emploi attendent une place dans des homes temporaires à bas prix. Primrose House sert d’asile aux convalescentes, aux isolées dont le salaire est insuffisant. Si elles ne gagnent qu’un dollar par semaine, on leur demande 25 sous, 50 si elles en gagnent deux, ainsi de suite ; quand elles arrivent à gagner plus de cinq dollars on les engage à aller demeurer ailleurs. Tous les clubs sont aussi des bureaux de placement.

Les autres villes d’Amérique ont suivi l’élan donné par miss Dodge[1]. Les excellentes associations de Boston s’efforcent de former des domestiques, elles veillent sur les voyageuses inconnues et désemparées, envoyant leurs agentes aux bateaux pour fournir conseils et renseignemens à celles qui en ont besoin. Baltimore est peut-être la ville où les différentes églises s’entendent le mieux pour ces œuvres si utiles ; les sociétés protestantes ayant admis sans discussion dans leur sein les catholiques, la maison dite de Saint-Vincent s’est ouverte avec une tolérance égale aux protestantes. Philadelphie, la cité des quakers, est assez exclusive au contraire, mais elle ne se laisse dépasser par aucune autre ville en munificence. La guilde des ouvrières du New Century est renommée. Des centaines de jeunes filles y trouvent toute sorte de leçons pour se perfectionner dans les travaux manuels ; on voit venir le temps où elle se transformera en un collège des arts et métiers qui, à sa manière, vaudra bien les autres. Et toujours le même soin donné au développement moral, comme l’atteste le club qui porte ce nom curieux : « Club d’une fois par jour. » Les membres signent l’engagement de chercher à rendre tous les jours un service, — si petit qu’il soit, — à une personne qu’elles n’aient aucune obligation d’aider. L’hospitalité de nuit sur une vaste échelle est associée à plusieurs de ces homes. Les

  1. Voir l’article sur la Condition des femmes en Amérique, Chicago, 1er  juillet.