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LES REVUES ÉTRANGÈRES

REVUES ESPAGNOLES

LITTÉRATURE ET HISTOIRE : Les allusions contemporaines dans le Don Quichotte ; Juan del Encina et les origines du théâtre espagnol ; un écrivain romantique continuateur de Bossuet. — Le mariage du roi Alphonse XII avec l’Infante Mercedes.

Les articles intéressans ne manquent pas, dans les revues espagnoles, et en particulier dans la España moderna, qui est sans contredit la plus importante d’entre elles. Mais ce sont pour la plupart, des notes ou des dissertations sur des points très spéciaux de l’histoire et de la littérature espagnoles : histoire et littérature dont les grandes lignes mêmes nous sont aujourd’hui si peu connues, que l’intérêt de leur menu détail risquerait bien de nous échapper. La faute n’en est d’ailleurs qu’à nous seuls. Entraînés vers le Nord, attirés par l’étrangeté, et peut-être aussi par l’obscurité du brumeux génie, septentrional, nous avons perdu de vue le développement intellectuel de ces races latines, qui, durant tant de siècles, avaient pensé, senti, créé à l’unisson de la nôtre. Il n’a pas fallu moins que la traduction d’un roman tolstoïen de M. d’Annunzio, l’année dernière, pour nous rappeler l’existence d’une littérature italienne. Et de la littérature espagnole nous continuons à ne rien savoir, ou peu de chose, tandis qu’il n’y a pas si petit écrivain Scandinave que l’on ne réussisse à nous faire admirer.

La littérature espagnole existe, cependant : et rarement peut-être depuis le XVIIe siècle elle a été si vivante. Mais je crains que longtemps encore nous continuions à devoir l’ignorer : car elle s’obstine à garder un caractère national très marqué, à rester essentiellement locale, à exprimer des sentimens et à parler une langue que seuls des lecteurs espagnols sont en état de comprendre. On aura beau vouloir nous