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REVUE DRAMATIQUE

Comédie-Française, Vers la joie, conte bleu ou cinq actes on vers, par M. Jean Richepin. — Gymnase, Pension de famille, comédie on quatre actes, par M. Maurice Donnay.

La naïveté est à la mode, dans les livres et sur les planches. Les légendes nous plaisent, les histoires où il y a des ogres et des fées, les récits merveilleux, les contes populaires et les chansons paysannes, toute une littérature de nourrices et de petits enfans. Nous en aimons la simplicité par contraste avec nos complications. Il ne nous suffit pas de rechercher les vieux motifs et les airs d’autrefois, nous nous efforçons d’en composer de pareils. Des auteurs à la langue déliée rapprennent l’art de balbutier… Si l’échec de Vers la joie ! pouvait contribuer à nous guérir de ce goût pour de laborieuses puérilités, M. Richepin n’aurait pas fait une œuvre inutile, et nous devrions des remerciemens à la Comédie-Française.

C’est pour un conte bleu que M. Richepin nous donne ses cinq actes de vers. Nous savons assez bien ce qu’on entend par là, et nous ne sommes pas si barbares que nous nous refusions à goûter le charme d’une fiction légère. Nous ne demandons pas mieux que d’accueillir ces personnages irréels qui s’en iront dans un décor de rêve tenant des propos chimériques. Est-ce notre faute si, le rideau à peine levé, déjà nous sommes déçus ? Car nous reconnaissons tout de suite le palais où gouverne le grotesque Truguelin flammé de ce bélître d’Agénor ; et nous connaissons bien que ce n’est pas le palais du Prince charmant. Nous avons déjà vu ces ministres solennels et muets : nous avons entendu ces plaisanteries foraines dont le coq-à-l’âne fait tous les frais. S’il nous semble qu’il y manque quelque chose, c’est que de coutume ces paroles ont pour accompagnement des musiques d’Offenbach ou de Lecocq : nous aspirons aux flonflons de l’orchestre. Tout d’un coup