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désaltère pas du tout. Pour apaiser la soif, il faut boire ou très froid ou très chaud. Dans les excursions, dans les courses sous le soleil, on se trouve très bien d’imiter les Chinois et de boire de temps en temps par gorgées un peu de thé très chaud sans rhum et sans sucre.


IV

Le maté est la moins intéressante des boissons aromatiques, parce que c’est la moins répandue et que son usage est inconnu en Europe. Il constitue la boisson ordinaire des habitans du Parana, de l’Uruguay et d’une partie du Brésil. Ce sont les Jésuites du Paraguay qui nous l’ont fait connaître ; aussi le désigne-t-on d’habitude sous le nom de thé du Paraguay, des Missions, ou des Jésuites.

La plante qui le produit est l’Ilex paraguensis. C’est un arbuste de quatre à cinq mètres de hauteur, à feuilles glabres, lancéolées, oblongues, dentelées en scie ; les fleurs sont disposées en bouquets axillaires ; ses baies sont rougeâtres et agglomérées, le tronc et les branches sont recouverts d’une écorce blanchâtre, luisante et d’une apparence veloutée.

Le maté croît naturellement, d’après Martins, entre le 18e et le 30e degré de latitude sud, mais il atteint son plus grand développement du 21e au 24e, dans les vallées et sur le versant des collines qui séparent le Parana du Paraguay. Le meilleur maté se récolte dans une zone comprise entre Serra-Ammahuby au sud et Serra-Maracaja au nord. Des recherches poursuivies au jardin botanique de Rio-Janeiro portent à penser que six espèces d’ilex concourent à la production du maté commercial. A l’Exposition universelle de 1889, on pouvait en voir des échantillons très divers, dans les pavillons du Brésil, du Paraguay et de la République Argentine.

Tous n’ont pas la même valeur ; les produits recueillis sur les bords de la Plata, où le maté est exclusivement préparé avec l’ilex Paraguensis, sont considérés comme supérieurs à ceux du Brésil qui n’ont pas la même homogénéité.

Le maté se propage au moyen des graines qu’on débarrasse d’abord de leur pulpe gélatineuse. Lorsque les jeunes plantes ont atteint une hauteur de 15 centimètres, on les repique à trois ou quatre mètres de distance l’une de l’autre, dans un terrain humide et en les abritant sous de grands arbres pour les préserver de l’ardeur du soleil. Quand elles ont atteint deux mètres de hauteur, on coupe les arbres qui les abritaient, et, après quatre ans, on peut récolter les feuilles. Un plant de sept ans en donne de trente à quarante kilogrammes. La récolte se fait depuis le mois de