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remplace le biscuit : mais le résultat est le même au point de vue du travail et de la fatigue, et ce que nous avons dit des observations faites dans l’armée bavaroise prouve à quel point ce résultat est appréciable.

Les avantages du café sont encore plus remarquables dans les troupes qui séjournent et font campagne dans les colonies. Aucun breuvage ne désaltère et ne soutient mieux les forces. En ajoutant cette infusion à l’eau souvent de mauvaise qualité à laquelle on est réduit dans les expéditions, on la corrige et on en diminue les inconvéniens. Tous les médecins militaires sont d’accord à cet égard. Ils attribuent également au café une action fébrifuge que nous croyons avoir également constatée ; mais cela nous éloigne quelque peu de sa valeur nutritive à laquelle il est temps de revenir.

En dehors de l’armée et de la marine, le café se prend au repas du matin à l’état de mélange avec le lait. On y fait tremper du pain ou des gâteaux suivant le goût et la position de fortune, Les trois quarts du calé qui se consomme en Europe sont pris sous cette forme.

Le cale au lait a été encore plus vivement attaqué que le café noir, et son usage ne s’en est pas moins développé, ce qui prouve que le bon sens du public finit pas prévaloir contre les idées préconçues. Naguère encore les médecins le considéraient comme un aliment très inférieur, qu’il fallait interdire aux personnes débiles, lymphatiques et surtout aux jeunes filles pour lesquelles il avait, disait-on, des inconvéniens tout spéciaux.

Ce préjugé remonte à une époque assez reculée, puisque Zimmermann l’attribue à Fr. Thiry, mais il a été défendu de nouveau en 1846, par A. Carron, dans la Gazette médico-chirurgicale. Ces articles furent le signal d’une reprise des hostilités contre le café au lait ; mais elles sont oubliées aujourd’hui. Il est certain, comme le fait observer Fonssagrives, dans ses Entretiens familiers sur l’hygiène, que si l’on veut parler du calé au lait des portières de Paris, c’est-à-dire de ce liquide louche, préparé avec du café suspect, mélangé de chicorée plus suspecte encore et étendu d’un lait équivoque ; nul doute qu’un litre de cette boisson ne constitue un déjeuner très reprochable au point de vue de l’hygiène, mais une petite tasse de café au lait dont les deux facteurs sont excellens ne saurait avoir que les qualités d’un aliment bon, savoureux et réparateur.

Le raisonnement et l’analyse confirment du reste l’opinion de ce grand hygiéniste. Le lait est l’aliment le plus complet qui existe, puisqu’il suffit à l’alimentation de tous les mammifères, pendant