semi-circulaires du Musée de Kensington : les Arts de la guerre et les Arts de la paix. Prenez l’ensemble de son œuvre : comparez-la à nos œuvres françaises, et ce qui est britannique en M. Leighton, quoique bien voilé par son éclectisme, transparaîtra encore. D’abord, quel est de nos jours le Français qui ira, dans l’Evangile, choisir le sujet tout psychologique des Vierges sages et des Vierges folles ? Quel est celui qui, méditant de décorer le Panthéon, prendrait comme M. Leighton ce texte de l’Apocalypse : « Et la mer rendit les morts qui étaient en elle, » projet de médaillon pour l’église de Saint-Paul. Ce que M. Leighton découvre dans la mythologie est tout aussi inattendu. Quel Français moderne s’aviserait de représenter Hercule se battant avec la Mort pour lui enlever le corps d’Alceste, ou bien encore Cymon apercevant pour la première fois Iphigénie, qui dort sur une fontaine ?
Ensuite l’assiette des figures et la draperie, si elles n’ont pas, chez le président de la Royal Academy, la même originalité qu’on note chez Burne-Jones, Rossetti ou Madox Brown, n’en sont pas moins très éloignées de ce que donne naturellement le modèle d’atelier. Le groupe des Vierges folles dans la fresque de l’église de Lyndhurst, offre un parti pris de similitude dans les expressions, de parallélisme dans les plis, que nous trouvons rarement dans l’école française. Les Fils de Rizpah aussi. Quand M. Leighton aborde le parallélisme des lignes, il le fait, intrépidement. Dans son Electre à la tombe d’Agamemnon, les plis de la calyptre tombent droit, du col aux pieds, auprès d’une colonne dorique aux cannelures droites, en avant d’un laurier droit. Et puisque nous étudions les plis, disons tout de suite que ce sont eux qui donnent aux figures académiques de M. Leighton, — à son Andromède, à son Andromaque captive, à ses Hespérides, — leur caractère distinctif et britannique. Nues, les femmes des tableaux de M. Leighton sont françaises ; drapées, elles sont anglaises. Car les Anglais, depuis Madox Brown jusqu’à M. Burne-Jones, et depuis M. Watts jusqu’à M. Leighton, en passant par M. Albert Moore, se forment un idéal de la draperie qui leur est tout particulier. Pour eux, la draperie la mieux disposée est celle qui fait le plus de plis. Ils sont ravis quand d’innombrables ourlets se suspendent en guirlandes autour des épaules, cernent les seins, ligottent le torse, les hanches, coulent à terre et bouillonnent autour des pieds de la déesse. Ruskin dit quelque part, dans ses Matinées florentines, que la recherche du plissage et la minutie de son rendu sont toujours le signe de l’idéalisme, du mysticisme, et à l’appui de cette opinion, il cite les plis des canéphores du Parthénon, et les surplis de nos prêtres, tandis que le drapé large,