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se destinent à l’industrie, à l’agriculture, en ont besoin. Jusqu’ici, en dehors de certaines écoles spéciales dont l’accès n’est pas ouvert à tous, ils ne les trouvaient nulle part. Jusqu’ici, on n’enseignait la physique et la chimie, au lycée, qu’en vue des concours aux écoles du gouvernement, dans ces écoles, qu’aux élus de ces concours. Cependant, en dehors de ces élites, il y a des cliens. On l’a bien vu chaque fois qu’une faculté des sciences, celle de Lyon la première, puis celle de Nancy, ont ouvert un enseignement régulier de chimie ou de physique industrielle. Les élèves ont afflué, et les résultats ont dépassé les espérances.

Que de tels enseignemens ne puissent trouver place dans toutes les facultés, j’en conviens sans difficulté ; ils doivent, pour réussir, répondre à des besoins locaux, régionaux, qui ne sont pas partout les mêmes. Mais partout, dans toutes les facultés, peut se donner l’enseignement d’initiation à ces études spéciales soit de l’industrie, soit de l’agriculture scientifique. Or, quel que soit le but ultérieur en vue duquel on les recherche, les élémens des sciences physiques, chimiques et naturelles sont partout les mêmes. Né d’un besoin particulier aux facultés de médecine, l’enseignement nouveau, considéré en soi, pouvait satisfaire également à d’autres besoins. Aussi a-t-il paru sage de l’ouvrir aux bacheliers de l’enseignement moderne aussi bien qu’à ceux de l’enseignement classique. On est même allé plus loin. Dans une pensée sagement démocratique, s’autorisant d’ailleurs de l’exemple de Lyon, où d’excellens élèves de l’Ecole de chimie industrielle, annexée à la faculté des sciences, viennent chaque année de l’Ecole primaire supérieure de la Martinière, on a décidé que pourraient y être admis les jeunes gens pourvus soit de leur brevet supérieur, soit du certificat d’études primaires supérieures, après constatation de leur aptitude par la faculté.

Telle est exactement l’économie des décrets de 1893 ; telles sont les espérances qu’ils permettent de concevoir. Il serait téméraire d’assurer qu’elles seront toutes réalisées du jour au lendemain, mais ce qu’on peut affirmer dès aujourd’hui, c’est qu’on peut compter, pour les réaliser, sur les facultés des sciences. Elles ont conscience qu’en se chargeant de ce nouvel enseignement, elles comblent une lacune dans l’enseignement national et qu’elles font œuvre bonne, utile au pays, utile à la science.


Louis LIARD.