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CHRONIQUE DE LA QUINZAINE.




30 septembre.


Les radicaux profitent de toutes les occasions pour attaquer M. le Président de la République. Quand les occasions manquent, ils les font naître, ou plutôt ils les inventent. Les vacances parlementaires ne sont généralement pas fertiles en incidens, mais leur imagination y supplée sans beaucoup de peine. S’il suffisait à un parti, pour être fort et influent, de montrer cette audace que conseillait Danton, audace sans scrupules et sans mesure, le parti radical serait le plus puissant de tous. Mais l’audace suffit-elle ? Ce qui nous fait croire le contraire, c’est que les radicaux, malgré toute celle qu’ils montrent, vont d’insuccès en insuccès. Depuis les élections dernières, il ne s’est pas produit un seul événement important qui n’ait tourné contre eux. Mis en demeure de former un ministère, ils n’ont même pas osé le tenter : ils ont mieux aimé se retrancher dans l’opposition, et attaquer par tous les moyens le gouvernement qu’il avait bien fallu constituer en dehors d’eux, puisqu’ils s’étaient publiquement reconnus incapables d’en prendre la charge. On sait à quel régime d’interpellations incessantes ils ont condamné le ministère. Lorsque l’une est terminée, une autre surgit aussitôt. Continuellement, il y en a quatre ou cinq en réserve, qui attendent pour prendre rang à l’ordre du jour. Mais sur une cinquantaine, c’est tout au plus si une ou deux atteignent leur but et font brèche dans le gouvernement : les autres prennent du temps pour n’aboutir à rien. Les radicaux marchent donc de déconvenues en déconvenues, malgré le concours empressé qu’ils reçoivent des socialistes, ou qu’ils leur donnent. Toutefois, rien ne les lasse, rien ne les décourage, et on les retrouve le lendemain d’une défaite aussi résolus et dispos que la veille. De tous leurs échecs, le plus considérable est celui qu’ils ont éprouvé lors de l’élection de M. le Président de la République. Ils comptaient sur un ballottage et sur le désarroi qui en résulterait dans les rangs de la majorité, pour jouer un de ces coups de partie dont le résultat, au milieu de la confusion générale, est toujours incertain et peut, par conséquent, se trouver favorable. Dès le premier tour de scrutin, la question a été tranchée et l’illusion des radicaux dis-