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civilisé qui se livrait à l’exploitation des mines, et dont les établissemens s’étendaient même au-delà du Mashonaland et du Matabeleland actuels. On a en effet constaté l’existence de galeries et de trous de mines d’une incontestable ancienneté comme aussi de ruines importantes en différens lieux du Transvaal, notamment dans le district de Kaap ; M. Païva de Andrada en a même signalé dans le pays de Changamira, situé au nord du Zambèze. La plus ancienne mention qu’il y en ait est celle que nous a laissée de Barros, l’historien des victoires et conquêtes des Portugais.

« Au milieu d’une plaine située dans le district de Taroa, dit cet auteur, et dans le voisinage d’anciennes mines d’or, s’élève une forteresse, de forme carrée, admirablement construite, à l’intérieur comme à l’extérieur, de pierres dures ; les blocs de pierre employés dans les murs ne sont pas reliés par du mortier et sont d’une grosseur merveilleuse ; les murailles ont 26 palmes d’épaisseur et un peu moins de hauteur ; au-dessus de la porte principale de cet édifice est une inscription que certains Maures savans qui ont été sur les lieux n’ont pu lire ; ils n’ont même pas pu deviner à quelle écriture elle appartient. Sur la hauteur autour de l’édifice, il y en a d’autres construits de la même manière, avec un revêtement de pierres sans chaux, et au milieu desquels s’élève une tour haute de plus de 12 brasses. Ces édifices portent dans le pays le nom de Zimbaoé, qui signifie pour les indigènes une résidence royale. En effet, ils nomment ainsi tous les lieux où le Bénomotapa réside ; ils sont distans de 170 lieues de Sofala, à vol d’oiseau, à la hauteur du 20e ou du 21e degré, et dans ce trajet, il n’existe aucun édifice analogue, ni ancien, ni moderne. On s’est livré naturellement à beaucoup de conjectures sur l’origine et la destination de cette forteresse : les naturels du pays pensent que c’est l’ouvrage du diable, parce que, comparé à ce qu’ils savent et peuvent faire, il ne leur paraît pas croyable que des hommes aient pu exécuter un semblable travail. Les Maures qui l’ont vue lui attribuent une grande antiquité, mais il n’existe dans le pays aucune tradition qui s’y rapporte ; ils pensent que le but de sa construction a été d’assurer à ceux qui rélevèrent la possession des mines qui sont très anciennes, mais dont on ne retire plus d’or depuis longtemps à cause des guerres qui désolent le pays[1]. »

Les indications de distances fournies par l’historien portugais permettent de reconnaître que la description qu’on vient de lire

  1. Joao de Barros, Asia Portugueze, 1re  décade, liv. VIII, ch. v.