ressemble en rien à l’impôt sur les revenus tel que nous désirons l’établir. C’est pourquoi il n’est pas d’une politique honnête d’appeler du même nom leur impôt et le nôtre.
A l’origine, la différence ne paraît pas sensible. Il suffit de ne pas définir le mot de revenu et de le considérer indifféremment au point de vue de la personne qui en jouit, ou au point de vue des produits dont il est composé, pour rester sur un terrain qui semble commun. Mais, même en renonçant à préciser cette première différence de point de vue, on s’aperçoit qu’on n’est pas d’accord aussitôt qu’il est question du proportionnel et du progressif. Ce paraît n’être d’abord qu’une question de méthode ou de tarif, c’est-à-dire de forme et de mesure ; on ne peut pas faire cependant qu’il ne s’agisse du fond même de l’impôt.
On entend aujourd’hui dans notre langue politique, par impôt sur le revenu, un impôt qui frappe les citoyens dans leurs revenus, et non pas qui frappe les revenus dans la diversité de leur origine et de leur manifestation, et on appelle non pas d’un seul et même nom, mais d’autant de noms qu’il y a de sources différentes de produits, les nombreux impôts qu’il est possible d’asseoir sur chacune de ces sources. Ce sont des impôts en faisceau, ce n’est point un impôt. C’est un système composé de plusieurs impôts réels, ce n’est point un impôt personnel.
Il ne sert donc de rien de vouloir changer la signification des mots ; il est clair que nous ne pouvons pas rendre identiques, en les appelant du même nom, les deux modes d’imposition que nous opposons l’un à l’autre.
Le propre de l’impôt sur le revenu, au sens politique du mot, est de se prêter à des combinaisons diverses en raison de la personne du contribuable. Le propre de l’impôt sur les sources du revenu est au contraire de ne s’y pas prêter. Il est inflexible au regard des personnes.
Le premier peut être proportionnel ou progressif à la volonté du législateur ; le second est exclusivement proportionnel et ne peut s’accommoder du progressif sans se détruire.
On ne peut pas nier que ce ne soit une idée venant très naturellement à l’esprit que de faire supporter à la partie la moins aisée de la nation un impôt moindre que celui qu’elle acquitte dans le système proportionnel.
On peut dire de l’impôt progressif sur le revenu qu’il est l’impôt sur ce qui excède le nécessaire et qu’en respectant le nécessaire le législateur obéit à ce sentiment de fraternité auquel on doit donner quand on le peut, surtout dans une république, une satisfaction légitime. Mais si c’est un impôt de sentiment, et de