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doivent toujours monter à l’assaut du pouvoir, et s’y assurer un certain nombre de places fortes afin de gouverner le pays dans l’intérêt du parti. Mais, s’il y a un grand nombre de radicaux impénitens, il y en a cependant qui demeurent accessibles aux discussions de bonne foi. Il y a surtout dans leur voisinage des hommes qui ont craint de se séparer d’eux pour l’utilité électorale qu’ils tirent de leurs relations avec eux, quoiqu’ils ne les aiment pas, mais qui commencent à perdre confiance en eux parce qu’ils en ont moins peur.

Il est donc temps d’opposer drapeau à drapeau et tactique à tactique. Le meilleur des drapeaux est toujours celui de 1789, la meilleure des tactiques est toujours la franchise. Affirmons donc nos principes en face de ceux des socialistes ; donnons le sens exact de notre doctrine historique et économique et mettons-la sans équivoque en contradiction avec la doctrine historique et économique des socialistes.

Je voudrais dire aussi brièvement que possible comment il me semble qu’on y peut arriver.


I

Notre doctrine financière n’est pas une invention ; nous en trouvons le fondement dans la première grande assemblée de la Révolution française. Nous sommes et voulons être les héritiers des grands hommes de ce temps-là. Nous prétendons appliquer leurs idées, avec les développemens que la suite des années et le progrès ont dû y apporter, mais sans en modifier le sens.

Au lieu de chercher une revanche de 1789, nous voulons en assurer la victoire définitive. Nous ne sommes ni 1793, ni Brumaire, ni 1814, ni 1815, ni 1830, car 1830 s’est effondré dans 1815. Nous ne sommes ni révolutionnaires ni réactionnaires : nous sommes des républicains libéraux. En finance comme en politique, nous sommes 89. Il y en a qui trouvent banale notre fidélité à cette grande date : nous trouvons, nous, que c’est une chance heureuse pour un parti politique que d’être né à une date de l’histoire et de pouvoir être désigné par cette date. Nous portons le nom d’une victoire, la victoire de l’idée moderne sur l’idée ancienne ; et cela nous suffit.

Il n’est d’ailleurs pas difficile, pour ceux qui veulent conserver l’héritage de l’Assemblée constituante, de caractériser la politique financière de cette grande assemblée et de la justifier.

Elle a son origine dans l’école physiocratique du XVIIIe siècle,