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dans le Medaghara prendre la parole d’El-Arbi-el-Derqaoui et jeter les premières bases d’un couvent rival de celui laissé par son père et à côté de la demeure de son frère. C’est en récompense de sa fidélité que le vieux chérif l’a désigné comme son successeur.

Durant son séjour au Tafilelt, à Dar-el-Beïda, point extrême du voyage, le sultan avait visité Abouam, le grand entrepôt des marchandises où s’opèrent dans le sud tous les échanges entre les caravanes du nord et celles qui vont au Soudan et dans les oasis de l’extrême-sud ; c’est à côté d’Abouam que se voient les ruines étendues de Sidjilmassa, l’antique Médinat-el-Hamra.

En donnant l’ordre de départ, Moulaï-el-Hassan prescrivit de liquider les immenses approvisionnemens amassés dans la région et on vendit alors à bas prix toutes les céréales si péniblement amassées : au point de vue financier cette expédition, manquée en ce qui concerne les choses du Sahara, fut ainsi déplorable. Le makhzen avait, il est vrai, touché de très fortes sommes sous forme d’amendes et d’arriérés d’impôts à son passage chez les Berbères. Mais les frais d’entretien des troupes dans ces mêmes régions furent très élevés, on dut même envoyer chercher de l’argent au trésor de Merâkech.

L’armée rentra en suivant la direction de l’ouest par les oasis de Fezna, de Tourouz, de Ferkhla ; elle traversa tout le Todra, le Dadès, puis elle obliqua vers le sud-ouest par les oasis de Skoura, la vallée de l’Ouad-Dadès, les Aït-Bou-Dellal, le Ouarzazet, la vallée de l’Ouad-Zineb et enfin elle marcha vers le nord en traversant le grand massif de l’Atlas par le défilé de Tizi n’Telouet où les troupes s’engagèrent dans les neiges après les chaleurs torrides que l’on avait eu à supporter dans cette expédition, la plus rude de toutes celles entreprises par le sultan. Après vingt et un jours de marche depuis le Tafilelt, le 19 décembre, on entrait à Merâkech.

Le 29 janvier arrivait le maréchal Martine Campos qui, par décret du 28 décembre, avait été nommé ambassadeur extraordinaire du roi d’Espagne auprès du gouvernement chérifien. En effet, les négociations précédemment entamées entre le général Macias et Moulaï-Arafa avaient été reprises par le maréchal Campos. Mais le prince marocain n’ayant point les pouvoirs nécessaires pour donner satisfaction au maréchal, celui-ci avait reçu l’ordre de se transporter à Merâkech. Après un mois de négociations assez pénibles, une convention portant la date du 5 mars était signée et mettait ainsi et très heureusement fin à l’incident de Melilla. Après avoir consenti au paiement d’une indemnité de vingt millions de pesetas, espacée en diverses échéances, et destinée à rembourser à l’Espagne les frais d’entretien et