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et de la parure. C’est un être aimant et un être de plaisir, léger, bavard, imprévoyant, paresseux. Le nègre a d’ailleurs ses qualités : il est sensible aux bons traitemens, susceptible d’un grand dévouement, mais capable aussi de haïr et de se venger avec cruauté. Bref, ce sont les qualités et les défauts de l’homme primitif, plus ou moins altérés par les siècles, par les milieux, par le hasard des circonstances, par les traditions et coutumes, par les rites des religions. La race nègre, depuis son apparition, n’a élevé aucun monument d’art ou de littérature ; l’état de ses connaissances est demeuré rudimentaire. Là même où le nègre a subi le contact des esprits les plus cultivés et reçu une éducation libérale, il n’a pas encore exécuté de travail génial dans un département quelconque de l’activité intellectuelle. Sous le rapport religieux, on sait que les noirs sauvages en sont restés au fétichisme le plus grossier ; ils croient que tous les objets, y compris les rochers et les fleuves, sont animés et peuvent exercer sur leur sort une influence favorable ou défavorable. C’est pour se rendre propices les âmes des morts et les innombrables divinités dont ils peuplent la nature, qu’ils font des sacrifices humains : au Dahomey et chez les Achantis, ce sont de véritables massacres.

La supériorité de la race jaune sur la noire est bien connue. La sous-race chinoise, principalement, a l’industrie patiente, la ténacité appliquée surtout aux petites choses, la sobriété, la constance au travail ; ses défauts sont la sensualité et, dans certains cas, la férocité. Sous le rapport de l’intelligence, il doit manquer quelque chose à la race jaune. Les Chinois en effet, à plusieurs reprises, ont rencontré par hasard de grandes découvertes : presse à imprimerie, poudre à canon, boussole ; mais ils n’ont rien su achever, ils n’ont tiré de rien aucune grande conséquence ; leur esprit reste toujours à moitié chemin. Ils ont graduellement perfectionné l’art de la poterie, mais, pour leur en faire perdre le meilleur secret, il a suffi de la destruction d’une ville où ce secret était conservé. Admirable en son genre, le Chinois est invinciblement utilitaire et positif. Ne lui demandez pas les grands essors, les grandes idées, les vues désintéressées et universelles : il représente la perfection du terre à terre. Les vastes synthèses ne sont point son fait : le détail l’absorbe. Observateur attentif, travailleur ingénieux et adroit, il fera, si on veut, tous les ouvrages de femme avec la plus minutieuse habileté : il coudra, il brodera, il repassera le linge. Ce qu’il aura vu faire une fois, il l’aura bientôt reproduit, car il est beaucoup plus imitateur que le blanc. Toute la pratique, toute la technique, tout ce qui est mécanisme n’aura bientôt plus pour lui de secrets. On