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LE
CARACTÈRE DES RACES HUMAINES
ET
L’AVENIR DE LA RACE BLANCHE

Toutes les races sont-elles de même valeur au point de vue de la civilisation ? La blanche, qui semble supérieure aux autres, est-elle désormais, comme on l’a soutenu, menacée ou d’absorption ou de recul progressif par le flot montant des races noire et jaune ? Après le crépuscule des dieux, aurons-nous, dans un certain nombre de siècles, le crépuscule des blancs ? Sur ce point ont été hasardés les pronostics les plus contraires. Tout récemment un livre de M. Pearson, ancien ministre de l’Instruction publique en Australie, causait un véritable émoi parmi les Anglais et les Américains . Chez nous, M. G. Le Bon et M. Barbé avaient déjà annoncé la rivalité imminente des trois grandes fractions de l’espèce humaine[1]. Les falsificateurs de l’histoire, si fréquens outre-Rhin, avaient jadis représenté comme une lutte de « races » la guerre fratricide de la France et de l’Allemagne, deux pays semblables, en réalité, par la composition ethnique. La vraie lutte des races que verront les siècles à venir, peut-être même le prochain siècle, c’est, prétend-on aujourd’hui, celle des noirs et des jaunes avec les blancs, notamment de la vieille civilisation chinoise avec la nouvelle civilisation européenne. — Vous vous épuisez, nous dit M. Pearson, en armemens gigantesques contre des peuples qui sont vos proches parens ; vous y dépensez votre or, vous y perdez vos forces, tandis que le barbare rassemble les siennes pour le printemps qui va venir. Votre vieille Europe se demande avec anxiété si tel peuple

  1. Voir Pearson, National life and character, Londres, 1893. — G. Le Bon, les Premières civilisations, Paris, 1889 ; les Civilisations de l’Inde, Paris, 1890. — Barbé, Revue Scientifique du 29 juillet 1893.