bienveillance, une aspiration commune, ce je ne sais quoi qui pousse tout homme digne de ce nom à lever les yeux au ciel et à y chercher le secours d’une puissance invisible, dont il dépend, et puis le sentiment de solidarité dans la souffrance, l’ardent désir de se concerter pour triompher du mal. Oui ! c’était bien là le double sentiment qui avait fait venir des extrémités du monde asiatique ces types de race et de religion naguère hostiles l’une à l’autre.
Dès la séance d’ouverture, ces sentimens trouvèrent d’éloquens interprètes :
« Dans ce congrès, s’écria M. Charles Bonney en souhaitant la bienvenue aux délégués étrangers, religion signifie amour et adoration pour Dieu, amour et service des hommes. On ne demande à personne ici d’abjurer ses croyances, ni même de faire le moindre compromis avec ses convictions. Nous ne prétendons pas davantage attribuera toutes les religions un mérite égal. Ce que nous voulons, c’est former la sainte ligue de toutes les religions contre l’irréligion et les amener toutes à conserver entre elles des rapports fraternels, pour le bien des mœurs, pour le progrès de la charité et du respect mutuel. »
Et Mgr Redwood, archevêque catholique de la Nouvelle-Zélande, fit écho à cet appel d’un laïque protestant, par la déclaration suivante :
« Je ne prétends point, en tant que catholique, posséder toute la vérité et être en état de résoudre tous les problèmes. Je sais apprécier la charité et tout élément de vérité en dehors de mon Église. Christ seul a pu dire : Je suis la vérité. Partout où il y a une vérité, il y a quelque chose de digne du respect, non pas seulement de l’homme, mais de Jésus-Christ, cette incarnation de Dieu… L’homme n’est pas seulement un être moral, il est un être social. Or la condition de son développement, de sa prospérité, c’est qu’il soit libre, libre non seulement en matière politique, mais en matière religieuse. Aussi faut-il espérer qu’aujourd’hui commencera une ère nouvelle, où, dans tout l’univers et dans chaque nation, sera extirpée cette idée qu’on doit opprimer l’homme pour cause de religion. C’est la charité seule qui peut amener les âmes à la lumière. »
Voilà certes un beau langage, digne de l’âge d’or du christianisme, et auquel les évêques d’Europe ne nous ont guère habitués. Si on le rapproche des paroles hautaines par lesquelles le primat de l’Église anglicane avait motivé son refus, il est permis de se demander quel est le vrai apôtre de la tolérance, du prélat catholique ou du primat protestant ?