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Les importations anglaises sont composées : de 40 à 45 pour 100 d’objets d’alimentation, de 30 à 35 pour 100 de matières brutes, nécessaires à l’industrie, de 15 à 20 pour 100 d’articles complètement ou partiellement manufacturés ; les exportations, de 77 pour 100 d’articles manufacturés, de 13 pour 100 d’articles partiellement manufacturés, de 0 pour 100 de matières brutes, de 4 pour 100 d’objets d’alimentation. La valeur moyenne des filés de coton et des cotonnades unies ou imprimées qui sortent chaque année des ports de la Grande-Bretagne pour se répandre dans le monde entier, dépasse 1 700 millions de francs. Il y faut ajouter près de 300 millions de tissus de laine ou de toiles de lin, 300 millions d’objets en fer, près de 300 millions de houille.

On comprend que de tels chiffres remplissent d’orgueil les âmes des fils de la Grande-Bretagne et qu’ils traitent avec quelque mépris, — ceux du moins qui ne sont pas usiniers et ne vivent point dans la fournaise industrielle du Lancashire, — les concurrences qui s’essaient en diverses parties du monde contre le géant britannique. Une de ces concurrences surtout a paru dans ces derniers temps redoutable, celle du commerce et de l’industrie de l’Allemagne. Les trembleurs ont fait de l’expansion commerciale allemande un épouvantail dont l’Angleterre et sa voisine du sud ont été en effet parfois un peu effrayées. M. Giffen a voulu savoir ce qu’il y avait de réalité dans ce fantôme. Il a dressé, pour le Board of Trade, quelques-unes de ces tables qui sont la spécialité de ce statisticien, et où les chiffres s’alignent dans un ordre si rigoureux, si savant, si ingénieusement mathématique, qu’ils acquièrent une force irrésistible d’argumentation et démolissent en quelques instans les thèses qui paraissaient le plus solidement étayées. Il a pris, par exemple, la moyenne des exportations de l’Angleterre, de la France, des États-Unis et de l’Allemagne pour les trois années 1890-92, et l’a comparée avec la moyenne correspondante des deux années 1884-85. Ce rapprochement lui a révélé que l’accroissement des exportations a été de 10 pour 100 pour l’Angleterre, de 14 pour 100 pour la France, de 26 pour 100 pour les États-Unis et de 5 pour 100 seulement pour l’Allemagne. Comme les États-Unis exportent surtout des céréales et du coton, l’augmentation de leurs expéditions n’est pas pour inquiéter. Mais quelle figure fait dans cette comparaison le commerce allemand, avec son expansion si modeste de 5 pour 100 ? Il y a autre chose dans les tables de M. Giffen : les nations secondaires, dans les diverses parties du monde, y apparaissent réparties en groupes, et on voit quelle proportion du total des importations de ces pays revient à l’Angleterre et à chacun de ses trois principaux concurrens. Le